Que ce fut long, que ce fut laborieux d’avancer dans cette histoire pourtant récompensée entre autres par le fameux Booker Prize en 2018 ! La quatrième de couverture promettait de stimuler ma lecture par « une énergie et un humour féroces » que je n’ai malheureusement jamais pu déceler dans ce récit, davantage déroutant et indigeste par sa forme que « puissant et obsédant » par son contenu.
Et pour cause, difficile de rentrer pleinement dans une histoire où tout est anonymisé et de s’attacher à des personnages exclusivement nommés par des termes tels que « presque petit ami », « premier beau-frère », « ex-petite amie », « troisième beau-frère », « peut-être-petit-ami », « plus ancienne amie », etc. J’ai lutté pour ne pas perdre le fil et l’absence de dialogues clairement formulés m’a littéralement noyée dans un flot incessant de pensées.
La forme monobloc du récit donne l’impression de ne jamais sortir d’un long monologue. Les quelques bouffées d’oxygène puisées en remontées le temps d’un changement de paragraphes n’ont pas suffi et je ressors triste et déçue d’être complètement passée à côté.
Pourtant, le fond de l’histoire méritait que je m’acharne à essayer de me transporter dans une autre vie, à une autre époque, dans un environnement politique et religieux explosif : celui des « Troubles » en Irlande du Nord.
Instabilités et conflits attisent la peur et la violence et c’est dans ce contexte que l’on suit le quotidien d’une jeune fille, la narratrice, dont on ne sait finalement pas grand-chose, si ce n’est qu’elle aime lire en marchand. Ce simple fait suffit à la rendre suspecte aux yeux des gens. Des rumeurs sont lancées, alimentées par son beau-frère qui prend un malin plaisir à la persécuter.
Alors qu’elle tend à la discrétion et qu’elle fait tout pour ne pas se faire remarquer, elle devient la cible de commérages au sein de la communauté lorsqu’elle rencontre un homme, « le laitier », qui n’en est d’ailleurs pas un, qui ne cesse de la suivre et de la harceler. Elle ne peut pas compter sur le soutien de sa mère, qui ne croit pas les dires de sa fille, et découvre peu à peu que tout autour d’elle n'est que politique, suspicions, dangers potentiels, manipulations, haines oppressantes et morosité ambiante.
J’ai eu du mal à me laisser porter par son envie de liberté, par sa prise de conscience d’une réalité différente et d’un monde plus vaste. Difficile de suivre quand le langage oscille entre divagations puis obsessions soudaines, et que l’écriture alterne entre moments violents, tendresse et futilités.
Et paradoxalement, je me dis que c’est peut-être là que réside la magie et la force de ce livre, qui n’aura pas eu la chance de tomber entre mes mains et mon absence de compréhension face à son potentiel et son originalité.