Les Chroniques de l'Imaginaire

Le liseur - Schlink, Bernhard

Michaël a quinze ans et sort tout juste d’une jaunisse qui l’a éloigné de l’école pendant plusieurs semaines. Victime d’un malaise lors d’une promenade, il fait la connaissance de Hannah, une femme d’une trentaine d’années qui lui vient en aide et le raccompagne chez lui où il poursuit sa convalescence.

Quand il se sent mieux, il rend visite à Hannah afin de la remercier. Il est troublé par cette femme qui lui parle peu et, très vite, ils entament une liaison. Pendant plusieurs mois, Michaël ne va vivre que pour cette femme, en cachant à sa famille et ses amis cette liaison passionnée. Très vite, Hannah va demander à Michaël de lui faire la lecture et à chacune de leur rencontre il va lui lire des romans ou des poèmes. Jusqu’au jour où Hannah disparaît tout simplement. Son ex-logeur et son ex-employeur ignorent où elle a bien pu disparaître, et Michaël se posera longtemps la question.

Jusqu’au jour où, durant ses études de droit, il assiste à un procès d’anciennes gardiennes SS du camp d'Auschwitz et de Cracovie. Il découvre alors qu’Hannah fut une gardienne de camp et qu’elle est sur le banc des accusées. Il découvre aussi, par hasard, le secret qu’elle lui a caché et qu’elle cache encore devant la cour.

Divisé en deux parties, ce roman est difficile à lâcher en cours de lecture. La première partie est consacrée à l’histoire d’amour entre Michaël et Hannah, du seul point de vue du jeune homme, et on voit comment d’adolescent un peu gauche il devient un jeune homme et étudiant en droit.

C’est d’ailleurs grâce à ses études qu’il va retrouver Hannah, et renouer avec elle au terme du procès, d’une façon très particulière puisqu’il lui envoie des cassettes où il enregistre ses lectures. En effet, le secret d’Hannah est qu’elle est analphabète. Elle ne sait ni lire ni écrire, ce qui lui porte préjudice lors de son procès, mais elle est trop fière pour avouer cette lacune.

Au fur et à mesure de l’histoire et du procès on se rend compte de la difficulté d’aborder la mémoire des camps au sortir de la guerre. Mais justice doit être faite, et quand Michaël comprend qu’Hannah ne sait pas lire, il hésite à aller voir l’avocat et le juge pour leur en parler. Pour que la sentence soit équitable.

C’est un roman que j’ai trouvé très prenant avec deux parties très distinctes. La première une histoire d’amour presque « classique » dans le thème de l’adolescent qui séduit une adulte (il lui ment sur son âge), et la seconde partie complètement différente qui nous fait plonger dans une réflexion sur l’après-guerre, les difficultés de trouver une peine juste, mais aussi cette analphabétisme d’Hannah qui a conditionné toute sa vie, y compris son engagement chez les SS.

Dans la première partie, on retrouve toutes les pensées d’un adolescent qui découvre l’amour, le sexe, mais aussi la dissimulation à son entourage proche, puis son évolution vers un jeune étudiant, puis un adulte qui aura beaucoup de mal à parler de son histoire avec Hannah, ce qui compliquera ses relations amoureuses adultes.

Un excellent roman semi autobiographique — le narrateur suit les mêmes études que celles qu'a suivies l'auteur — donc qui évoque avec sensibilité mais sans pathos exagéré une période compliquée de l’histoire allemande.