Providence est gardien de parc. Pour tous les visiteurs, ce parc est comme tous les autres parcs. Un havre de paix, avec quelques cygnes qui défendent leur petit coin de verdure. Pour les enfants, c’est un terrain de jeu idéal, en particulier la cascade où ils aiment venir jouer.
Mais le parc n’est pas que cela. Et seul Providence et son chat Maldoror semblent voir qu’il y a des créatures étranges et parfois vindicatives qui y vivent et qui adorent la nuit pour surgir inopinément. Providence s’est donné pour mission de protéger le parc et ses visiteurs, bien que ceux-ci ne puissent pas voir les créatures.
Le parc est supervisé par la directrice, une femme austère, très procédurière, dont le credo est d’optimiser tout ce qui est sous son commandement. Elle goutte très peu aux explications de Providence quand celui-ci lui explique que les détecteurs qu’il a placés un peu partout lui sont utiles pour détecter la présence de créatures. Comme il est le seul à les voir, elle ne le croit pas et le prend pour un illuminé.
Il y a aussi les trois vieilles qui sont du côté de Providence, et dont on ne comprend pas, au premier abord, ce qu’elles font là. Et on comprend leurs rôles un peu plus tard, comme une évidence.
Un jour, alors qu’il vient de chasser les enfants qui viennent, une nouvelle fois, d’enfreindre la consigne de ne pas jouer sur la cascade, Providence découvre dans l’eau, et après une lutte acharnée avec les créatures qui y rôdent, un livre étrange, dont les pages blanches lui sont à la fois familières et étrangères. Et Providence découvre que ce livre est convoité par plusieurs personnes…
Daria Schmitt nous plonge dans un monde imaginaire riche et intense qui, dès le premier regard, n’est pas sans rappeler les contrées imaginées par Lovecraft. Et c’est voulu, puisque cette BD est un hommage à cet auteur, au point qu’il y a même, directement au sein de l’histoire, une nouvelle de Lovecraft qui a été traduite et insérée là en guise de lettre de démission de Providence. A noter que Providence est le nom de la ville de naissance de l’écrivain, c’est un joli clin d’œil de l’autrice à celui qui l’a inspirée.
L’ensemble est un peu déroutant au premier abord, on passe du noir et blanc à la couleur, pour revenir au noir et blanc, et chaque page foisonne de détails, au point d’en être parfois oppressante. On apprécie le duo Providence/Maldoror, l’homme et son chat, qui communiquent sans aucun souci, via la parole. Et c’est en l’écrivant que je me rends compte que ça ne m’a même pas étonnée à la lecture, un chat qui parle nous montre bien qu’on est dans un univers fantastique, même si seulement de rares personnages le savent et que le fait est ignoré de la majorité.
C’est une BD qui sort de l’ordinaire préfacée par Philippe Druillet qui parle d’une traversée du miroir. Un peu comme Alice, beaucoup comme Lovecraft qui imaginait notre monde mais d’une autre façon, à l’envers.
A noter que le bandeau lui-même qui accompagne l’ouvrage est l’un des plus chouette que j’ai pu voir, illustré des deux côtés, sortant, lui aussi, de l’ordinaire.
Une BD à avoir pour tous les fans de Lovecraft, mais aussi pour ceux qui apprécient les styles qui sortent de l’ordinaire.