Quand Mathieu Gournay rencontre pour la première fois Eugénie Sarda, il en tombe instantanément amoureux. Elle est catalane, il est parisien, elle est vendeuse de mode, il travaille dans la pub, elle est sublime à ses yeux, il pense qu’elle est une star de cinéma, pour lui, c’est la femme de sa vie, l’héroïne de tous les films qu’il imagine, l’étoile changeante de son univers. Il est cinéphile, elle aime les films d’auteurs. Ils se trouvent, s’aiment pendant 677 jours, puis un jour elle s’en va.
Commence alors pour Mathieu une descente aux enfers. Pourquoi sa Lauren Bacall, sa Vivien Leigh, sa Marlène Dietrich est-elle partie ? Il l’ignore pendant 525 jours. Jusqu’à ce qu’elle l’appelle au secours. Il saute alors dans sa voiture, avec Love, la petite chienne qui parle, et file la rejoindre à Perpignan où elle habite désormais. Là-bas, Génie lui explique que quelque chose d’étrange lui est arrivé, qu’elle n’arrive pas à s’expliquer et Mathieu plonge dans ce qui semble être un délire psychotique.
Se mêle alors dans un maelstrom de scènes qui défilent à toute vitesse la Compagnie Catalane de Cinématographie, la station thermale de Carcaloubres, le camp de Rivesaltes, Perpignan, l’abbaye Saint Martin du Canigou, l’hôtel des 2 impératrices et pour terminer le Village, un établissement de soin psychiatrique où le couple atterrit afin de se faire soigner.
« Eugénie Sarda est l’actrice de ses rêves, il est son fan inconditionnel. Elle est sa reine, il est… » : telles sont les paroles du psychiatre qui les reçoit tour à tour, et qui commence par comprendre que, non, le chien ne parle pas, et que c’est juste une projection de la voix de son maître.
Ce roman truculent est joyeusement écrit. Mêlant habilement souvenirs et projections des protagonistes, on se demande souvent si on est dans la réalité ou dans leurs fantasmes. C'est assez déroutant par moment, puis on comprend comment ils fonctionnent, et au fil des page on détricote le fait que c’est une plongée dans la folie que nous suivons.
Folie d’un homme accro au cinéma (au point que ça en devient indigeste, beaucoup de références redondantes parsèment le roman), et folie d’une femme qui cherche à se raccrocher à la réalité, mais aime être au centre de l’attention de cet homme qui l’aime, car elle pense que seul lui peut l’aider. Le couple se retrouve ensemble dans cette folie qui déborde de partout. Dans les descriptions des lieux, dans les déductions qu’ils font sur ce qu’ils voient, ou croient voir, dans ce qu’ils pensent juste ou faux, il n'y quasiment aucun moment où on ne se demande pas à quel point ils ont pu basculer. Surtout qu'on s'aperçoit vite qu'ils s'entrainent mutuellement sur les pentes de cette folie.
J’avoue que j’étais assez séduite au début, puis l’exaltation est retombée. Plusieurs scènes sont redondantes, ainsi que les discours (en particulier celui du médecin qui les suit et qui essaie de les amener sur le chemin de la guérison), et l’amusement ainsi que la découverte du début fait place à un « ah, encore un truc bizarre ».
Il n’empêche que la plume d’Ada et du regretté Yves Rémy reste alerte et enjoué, avec l’invention de plusieurs mots valise, mais avec aussi, en filigrane, l’amour profond de ce couple pour le cinéma et les grandes stars qui ont brillé au firmament d’Hollywood.
Un livre pour les férus de cinéma, pour ceux qui aiment la folie, l’extravagance et les histoires d’amour débordantes de sentiments.
