Les Chroniques de l'Imaginaire

Les ombres de Rookhaven (Les Monstres de Rookhaven - 2) - Kenny, Pádraig & Bettison, Edward

Cinq ans se sont écoulés depuis la découverte par Mirabelle de ses véritables aptitudes, de sa nature à moitié humaine et de sa rencontre avec Jem et Tom.
Jem et Tom sont partis voler de leurs propres ailes loin du manoir depuis quatre ans déjà et les lettres de Jem se font de plus en plus rares, au grand désespoir de Mirabelle. Pour ne rien arranger, son ami de toujours, l’homme qui l’a mise au monde, le Docteur Ellenby, est gravement malade.

Son quotidien est cependant rythmé par l’approche de la Grande Configuration, événement magique d’importance ne survenant qu’une fois par siècle et conduisant de nombreux membres de la Famille au manoir de Rookhaven.

Billy est orphelin et a été recueilli par les Catchpole, membres parias de la Famille. Il a à son tour porté secours à Meg, à l’éternelle apparence de petite fille. Ils vivent reclus dans une cave. Billy, pouvant évoluer à la lumière du soleil et n’ayant pas besoin de s’alimenter, a la charge de l’approvisionnement de la petite famille. Au cours de l’une de ces sorties, il est capturé par des hommes étranges. Il va devoir collaborer avec eux et se rendre à Rookhaven s’il souhaite que Meg demeure saine et sauve.

Les ombres de Rookhaven est le second tome de la série. Il sera préférable d’avoir lu le premier tome, les Monstres de Rookhaven, même si cela n’est pas un passage obligé. Ce roman ne dépaysera pas les lecteurs du premier volet. L’ouvrage en lui-même est tout aussi attrayant : sa couverture aux accents gothiques, scintillante, les illustrations toutes en ombres d’Edward Bettison en font un très bel objet qu’on a plaisir à parcourir et à avoir dans sa bibliothèque. L’intrigue est aussi très similaire à celle du premier tome : un garçon débarque au manoir de Rookhaven et vient involontairement menacer la Famille, en particulier Goret et Mirabelle. De même, Mirabelle est à nouveau confrontée à sa nature semi-humaine et aux circonstances de sa naissance. La recette avait fonctionné lors du premier tome et fonctionne à nouveau ici. Toutefois, on ne peut que déplorer ce manque d’originalité.

J’ai regretté que les personnages du premier tome, Jem, Tom, Freddie, ne soient guère plus que des mentions, des apparitions fugitives. C’est dommage car on avait appris à les connaître et leur absence génère donc une sorte de vide. Exit également les aller-retours entre les humains, les membres de la Famille et Mirabelle, qui opéraient comme autant de portes d’entrée vers des univers différents. On entend très peu parler du village, si ce n’est à travers de la maladie du Docteur Ellenby. Cette partie de l’intrigue est très bien traitée, bien que très secondaire. Elle nous permet notamment d’en apprendre plus sur Olibrius, aux étonnants pouvoirs.

Dans ce second tome, c’est donc davantage sur les membres de la Famille qu’on en apprend plus. On assiste cependant moins à des scènes du quotidien, sans doute parce que Billy n’est pas totalement étranger à ce monde. D’allusion en allusion, de confrontation en confrontation, on découvre quelques rouages de l’organisation de ces êtres non humains bien que le tout demeure encore énigmatique à souhait. Pendant de ces aspects, l’action est davantage au rendez-vous. C’est en effet à une véritable course-poursuite aussi bien qu’à une course contre la montre qu’on assiste. L’auteur nous offre toujours des passages sur les tourments intérieurs de ses protagonistes, souvent par l’intermédiaire de Goret. Cependant, ceux-ci ne nuisent absolument pas au rythme effréné du récit. Il sait de plus nous prendre par surprise à plusieurs reprises. Le dénouement final est en ce sens particulièrement bien réussi.

Les protagonistes sont bien campés. On retrouve bien sûr Mirabelle, Olibrius, leurs oncles et tantes mais on découvre aussi de nouveaux personnages, qu’ils soient venus pour la Grande Configuration à l’image de la revêche tante Mavus ou liés à Billy, comme Meg. Sans surprise, les personnages sont une nouvelle fois nuancés : les monstres sont parfois bel et bien monstrueux mais les humains peuvent l’être tout autant, rien n’est tranché. Certains personnages peuvent même osciller entre les deux univers comme entre les deux côtés de la force.

Les ombres de Rookhaven plaira aux lecteurs du premier volet désireux d’en apprendre plus sur la Famille, à ceux aimant les traques, les personnages malmenés par la vie et les monstres qui n’en sont peut-être pas.