À dix-neuf ans, Cléo ignore ce qu’elle veut faire de sa vie, au grand désespoir de son père, policier dans une petite ville des États-Unis. Il faut dire que la jeune fille a son lot de problèmes : sa mère est décédée et son père est déçu par son habitude de ne rien écouter et de faire les quatre-cents coups. Comme si cela ne suffisait pas, les cachets donnés par son psy ont tendance à ralentir son esprit.
Un soir qu’elle rentre d’une soirée pénible de baby-sitting, Cléo est attaquée par une étrange créature fantomatique. Trois femmes viennent à sa rencontre, l’une très âgée, l’autre très jeune, la dernière d’une quarantaine d’années. Toutes trois lui ressemblent comme deux gouttes d’eau, à l’exception de la différence d’âge. Avant qu’elle n’ait pu s’interroger davantage sur cette bizarrerie, Cléo est renversée par un camping-car et meurt. Elle est surprise de se réveiller à l’hôpital, parfaitement en vie, avec pour unique trace de sa soirée la blessure infligée par le spectre. Persuadée qu’elle n’a pas été victime d’une hallucination, elle se lance à la recherche des trois femmes qui ont profité du tumulte provoqué par son accident pour disparaître. Son enquête va remettre en cause tout ce qu’elle croyait connaître du monde et de sa propre vie.
Cléo est une adolescente qui, au départ, est exaspérante à suivre. Elle est vulgaire, provocante et commet des délits sans arrière-pensées. Pourtant, à mesure que l’histoire avance, ce vernis de grossièreté s’érode et on découvre ses fragilités et ses nombreuses qualités. La manière dont elle évolue au fil du récit est donc d’autant plus intéressante.
L’auteur réussit le pari risqué de donner vie à des déclinaisons de Cléo de manière convaincante : on arrive sans mal à se retrouver parmi les différents personnages secondaires. Comme la protagoniste principale, on est bien sûr curieux de lever le mystère de l’identité de ces sosies.
Ce mystère est pour partie éclairci dans les deux premières parties de l’ouvrage, qui en compte six. Les deux parties suivantes sont moins rythmées. On y apprend à mieux connaître les personnages et leurs motivations, ce qui est essentiel pour comprendre les enjeux du reste du récit mais j’avais hâte que l’action redémarre. Heureusement, les deux dernières parties sont très mouvementées, plus encore que les premières. La fin de l’ouvrage ne lésine pas sur les scènes d’action.
Sans trop en dévoiler, l’ouvrage comporte des éléments mythologiques qui m’ont beaucoup plus, et flirte de manière générale avec la fantasy urbaine. Pour les amateurs, l’auteur propose des playlists à écouter en cours de lectures et indique quels acteurs il aurait sélectionné pour incarner ses héros. Il n’hésite pas non plus à faire référence à de la culture populaire en cours de lecture. J’avoue avoir dû chercher sur Internet certaines des noms cités mais le procédé fonctionnera sans doute mieux avec des lecteurs plus jeunes.
Une armée à moi seule est un ouvrage qui plaira aux amateurs de fantasy urbaine à la recherche d’un surnaturel un peu différent, qui ne mobilise ni vampire, ni loups-garous mais se pare d’accents mythologiques.