Sancia a bien changé au cours des trois années écoulées. Elle n'est plus exactement l'ancienne esclave solitaire vivotant en cambriolant les maisons marchandes. Sa rencontre avec Clef lui a permis de bouleverser l'équilibre de sa propre vie aussi bien que celui de la ville de Tevanne. Désormais en couple avec Bérénice, elle apprend à perfectionner son don pour les enluminures sous l'égide d'Orso tandis que Gregor n'est jamais bien loin pour défendre leur société, Interfonderies. Pourtant, Orso, Bérénice, Gregor et elle ont tous un point commun : ils veulent aller plus loin dans leur révolution politique en offrant à tous la connaissance des enluminures et pourquoi pas même en renversant toutes les grandes maisons.
Leurs projets sont chamboulés le jour où Valeria, ancienne construction du Faiseur, reprend contact avec Sancia pour l'avertir de l'arrivée d'une grande menace. Crasedes Magnus le hiérophante pourrait revenir d'entre les morts et menacer l'humanité toute entière.
Ce second tome de la trilogie des Maîtres enlumineurs nous ramène à Tevanne, trois ans après les évènements du premier opus. On découvre vite les retombées, à première vue positives, des actions passées de Sancia et de ses amis. J'ai d'ailleurs particulièrement apprécié de retrouver Sancia et ses amis, dont certains sont assez intrigants. Après la lecture du premier tome, je brûlais d'en apprendre plus sur le passé et le devenir de Gregor, sur les projets d'Orso mais aussi de découvrir comment allait évoluer l'attirance mutuelle entre Sancia et Bérénice. Ce tome répond pour partie, mais pour partie seulement, à cette attente.
Tout va très vite dans cet ouvrage, pour le meilleur comme pour le pire. On a en effet le droit à des scènes d'action de plus en plus impressionnantes, à un suspense haletant, à des enjeux qui deviennent démesurés. Nos héros ne cessent de tomber de Charybde en Scylla et ce jusqu'aux toutes dernières pages. Tout cela fait qu'on ne lâche pas l'ouvrage avant de l'avoir achevé.
Cependant, les personnages en pâtissent quelque peu. Leur personnalité est également moins bien campée que dans le premier opus... de manière volontaire, en raison des effets d'une enluminure bien spéciale. Le procédé narratif est intéressant et attise la curiosité. Cependant, il éloigne également le lecteur des protagonistes. On se sent moins attaché à eux et à leur devenir, alors même que les périls qui les frappent sont bien plus menaçants que dans le premier tome. Certains des nouveaux personnages et de leurs arcs narratifs sont aussi éclipsés par la quasi-omniprésence des combats et on aurait même pu se passer de leur présence s'ils ne semblaient pas nécessaires au dernier tome de la trilogie.
L'ouvrage comporte des atouts non négligeables. Les rares temps morts dans le récit sont ainsi l'occasion de conversations entre les personnages sur la nature du pouvoir, la quête de justice, l'identité, le libre-arbitre, le sacrifice, qui ne sont pas sans impact sur l'intrigue. Ainsi, Le retour du hiérophante n'est pas seulement une déferlante de scènes d'action ambitieuses mais aussi prétexte à quelques réflexions de philosophie politique, sous couvert des choix que devront réaliser les protagonistes. J'ai apprécié cette double-dimension : sensations fortes ne riment pas nécessairement avec écervelé.
Contrairement au premier tome qui pouvait se suffire à lui-même, ce roman s'achève dans un suspense insoutenable qui donne envie de se jeter très vite sur le suivant pour connaître la conclusion de son histoire. Les amateurs du premier tome, de conflits à foison et de magie atypique aimeront sans nul doute !