Le personnage conducteur de ce nouvel album de Gérard Mordillat et Éric Liberge est le jeune Luca. Il est un jeune élève artiste de Raphaël du seizième siècle et va être choisi par le Pape Léon X pour devenir un espion auprès des réformateurs allemands. Dès son arrivée en Allemagne, Luca va se confronter à deux grands penseurs de la Réforme Protestante : Martin Luther, frère augustin inspirateur de la Réforme, et Thomas Müntzer, prêtre défenseur d'une Réforme radicale.
Ce dernier a pour seul but de libérer les pauvres du joug qui les oppresse et va leur permettre de comprendre le message des Evangiles. Il est radicalement contre les privilèges du clergé et de la noblesse.
Quant à Martin Luther, il se fait surprendre par les conséquences de ses écrits tels que ses quatre-vingt-quinze thèses contre la commerce des indulgences financées par la papauté pour achever la construction de Saint Pierre de Rome. Malgré lui, il est à la naissance de la rupture entre Rome et l'Allemagne.
C'est donc le début de la réforme, Le peuple ne lâche rien et s'insurge contre les corvées et les impôts de leurs seigneurs. Luther retourne sa veste pour faire cause commune avec la principauté, la noblesse et le Clergé. Müntzer souffre avec le peuple et le soutient plus que tout face à ce regain de violence populaire. Le jeune Luca Ponti, quant à lui, continue son travail d'espion pour le pape Léon X.
Nous faisons face ici à une des premières révolutions populaires, la réforme protestante, née en Allemagne ; entre 1524 et 1526, des paysans prennent les armes par milliers. « Omnia sunt communia » - « Tout est à tous », mot d'ordre repris par Müntzer - définit bien l'enjeu de cette révolte : partager les richesses et stopper les souffrances du peuple.
Nous avons là un excellent récit historique passionnant et une parfaite illustration de cette guerre des paysans. Gérard Mordillat nous explique minutieusement le contexte. Les textes sont riches et lourds, mais décrivent à la lettre cette époque difficile de lutte entre le clergé, la noblesse et le petit peuple. Eric Labergé a aussi sa part de succès par ses tableaux peints en noir et blanc enfonçant encore plus la souffrance des plus démunis. Mais il est tellement évident dans un tel contexte d'opter pour ce côté sombre. Le rajout de trois pages en fin d'album pour nous expliquer cette époque sous le titre de "Omnia sunt communia" nous en apprend plus sur ces faits historiques, complété d'une page de chronologie.
C'est un album complet que nous avons entre nos mains nous décrivant une guerre contre les inégalités sociales et économiques résonnant encore aujourd'hui. En bref, un excellent cours d'histoire.