Les Chroniques de l'Imaginaire

Emergence 7 - Mondiot, Vincent & Saby, Enora

Emergence 7 n'est pas un simple roman pour ados, c'est un roman qui laisse des traces. Ici rien n'est rose, tout bascule dans les toutes premières pages, et tout ce que l'on peut craindre de l'histoire arrive. Nous sommes directement engloutis dans le sujet comme ces enfants qui n'ont rien demandé, qui attendent sur le port le bateau les emmenant à l'école sur le continent. Ils vivent en Bretagne, sur cette île qui est la leur, là où ils ont grandi. Ce sont leurs dernières heures d'insouciance.

Vingt ans après, Léon revient sur les lieux de son enfance et découvre son île transformée en cimetière et en lieu de commémoration. Il est difficile de survivre aux cauchemars, aux images qui le hantent et aux fantômes de ses amis disparus. Il culpabilise, en veut à la terre entière et n'arrive pas à se reconstruire. Ceux qu'il n'oublie pas : Joachim Traoré et sa grande sœur Romane, Nina Delage, Elliott et Priscille et enfin Alex, la fille dont Léon était secrètement amoureux... Sept ados emportés allant droit vers leur destin fatal ou le destin choisi par le monstre survenu de nulle part et qui a tout effacé sur son passage.

Vous ne connaîtrez pas l'origine de ce dernier, la naissance de cette Emergence 7 reste floue. Place à votre imaginaire. Et nous connaissons très vite l'issue de cette histoire. Mais là n'est peut-être pas l'intérêt de ce livre. Ce seront plutôt les flash-backs à répétition entre le retour sur l'île vingt ans après, le jour de l'apocalypse, et les jours heureux avant la date fatale. Léon se souvient de tous ces moments cruciaux, il réfléchit enfin à ce qui peut le reconstruire, une façon peut-être de sortir de cette vie latente. Leon doit décider face à ses souvenirs, face à sa dépression perpétuelle, comment il doit trouver son propre chemin et utiliser sa mémoire pour renaître une seconde fois.

Ce roman proposé par Vincent Mondiot avec l'illustratrice Enora Saby est un livre magnifique où la couleur est omniprésente avec ses illustrations pleine page. Différents contrastes appuient le scénario. On y trouve les couleurs de la Bretagne, de la mer, et de l'apocalypse imposée par le monstre. Cela passe du bleu vert des jours paisibles, à l'orangé couleur feu d'un monde cruel et explosif, une réelle opposition aux couleurs douces des jours heureux et innocents de l'enfance tels que le rose, le vert et le jaune chaleureux. Même si l'histoire est violente, les pages meurtries restent supposées, et c'est à nous de nous imaginer les blessures physiques et mentales. Les dessins sont flous et c'est tant mieux, mais les touches picturales prononcées en disent long.

L'auteur nous plonge ici dans un roman d'horreur brut avec ce récit d'une catastrophe à répétition par-delà le monde et passant par une petite île bretonne où la vie coulait parfaitement. Cette histoire permet au lecteur de se rendre compte des incidences d'un tel cataclysme, de la réflexion de chaque protagoniste et du traumatisme et des séquelles sur la vie des survivants. Nous expérimentons ici une lecture pour les jeunes lecteurs à partir de quatorze ans. Attention toutefois à ne pas mettre ce livre dans les mains des plus jeunes, la mort ainsi qu'une part de violence sont très présentes.