Dès le prologue, le fondateur de la psychologie analytique Carl Gustav Jung formule plusieurs avertissements au lecteur qui « relèvera dans ce livre l’absence d’une présentation clinique des phénomènes du transfert. C’est que mes réflexions ne s’adressent pas à des débutants ayant besoin des notions de base ». Rappelons donc que le transfert, dans le cadre de la relation analytique, est le processus par lequel les affects inconscients envers les premiers objets de l’analysé - le plus souvent les parents - s'actualisent sur l’analyste.
Si Jung s’accorde avec Freud sur l’importance fondamentale de ce phénomène dans la conduite de la cure analytique, il s’en distingue sur plusieurs points. En premier lieu, il considère le transfert comme un mécanisme normal et non pathologique inhérent à toute forme de relation. Deuxièmement, Jung établit un point d’entrée singulier en nous proposant une réflexion sur le concept psychanalytique de transfert vu à travers le prisme du symbolisme alchimique, tout en adressant au lecteur une seconde mise en garde : « je dois présumer du lecteur la connaissance de mon livre Psychologie et alchimie, sinon il lui sera difficile d’accéder à ma Psychologie du transfert ».
Le psychologue s’appuie, en effet, sur Le rosaire des philosophes, un des plus grands traités alchimistes publié en 1550, dont les gravures intégrées à l’ouvrage constituent le fil rouge de la pensée jungienne. Il s’agit de s’ouvrir au langage des images et des symboles – formant les archétypes jungiens – pour instaurer un parallèle entre les phases qui mènent aux « noces royales » et les étapes de la thérapie, c’est-à-dire à l’union, à la transformation puis à la renaissance du duo analyste / analysant.
A ceux qui s’étonneraient de son parti pris, Jung explique que « la théorie de l’alchimie [...] n’est pour l’essentiel qu’une projection de contenus inconscients, c’est-à-dire de ces formes archétypiques propres à toutes les créations imaginaires à l’état pur, telles que nous les rencontrons d’une part dans les mythes et les contes, d’autre part dans les rêves, les visions et les phantasmes des individus ».
Si la complexité de la Psychologie du transfert le destine d’emblée à un public déjà familier avec la psychanalyse freudienne et de la psychologie jungienne, les néophytes pourront s’initier à ses concepts avec son ouvrage le plus accessible, L’analyse des rêves.