Les Chroniques de l'Imaginaire

Un fils en or - Somaya Gowda, Shilpi

Quand Anil arrive aux États-Unis pour poursuivre ses études de médecine brillamment commencées en Inde, il découvre un univers entièrement nouveau auquel il devra s’adapter. Enfant d’un village pauvre et reculé dans son pays, il va devoir faire ses preuves pour prouver qu’il sera un bon médecin, tout en essayant de ne pas décevoir ses parents, en particulier sa mère, qui rêve pour lui d’un bon mariage. Quand son père meurt, sa mère lui demande de le remplacer, à distance, pour les doléances et les arbitrages que son père faisait pour les familles de la région.

Leena était la voisine d’Anil quand ils étaient petit. En grandissant, les enfants se sont un peu éloignés, et quand Leena atteint vingt ans, ses parents lui trouvent un mari, auquel ils offrent une dot conséquente. Mais la jeune femme découvre bien vite que la famille de son mari ne cherche qu’à l’exploiter et sa nouvelle vie devient bientôt un enfer.

On va donc suivre la vie des deux jeunes gens sur quelques années charnières, celles de l’entrée dans l’âge adulte.

C’est une belle découverte que j’ai fait en lisant ce livre. Il m’a rappelé par bien des côtés Docteurs, d’Erich Segall, non seulement pour le domaine médical dans lequel évolue Anil, mais aussi pour les difficultés d’intégration qu’Anil va connaître, entre le racisme latent de certains de ses voisins et la compétition acharnée entre les internes de l’hôpital. Sans compter son envie de prouver que sa famille n’a pas fait de sacrifice inutile pour qu’il devienne médecin.

C’est une histoire où deux mondes se côtoient mais ne peuvent pas se mélanger. D’un côté l’Inde, pays pauvre, encore pétri de traditions parfois mortifères, de l’autre les États-Unis, où tout semble possible, mais où demeure un racisme violent et où là aussi l’injustice règne.

Il y a aussi l'incompréhension de la famille d'Anil, entre la mère fière de son fils mais qui veut le ramener au pays auprès d'une épouse qu'elle aura choisi, mais aussi ses frères qui ont repris la terre de leur père et ont du mal à supporter les arbitrages qu'Anil doit donner par téléphone sur la demande de sa mère.

Anil va commettre des erreurs, Anil va apprendre, et c’est son évolution, ainsi que celle de Leena en parallèle, qu’on suit tout au long de ce livre. Anil va devoir s’affirmer, prendre des décisions, admettre qu’il a des failles, tandis que Leena va comprendre que la place de la femme, dans certaines familles, n’est pas juste. Elle en souffrira jusque dans sa chair, avec une scène d’une violence inouïe quand son mari tentera de l’immoler.

En filigrane, tout au long du livre, il y a l’amour qu’Anil porte à Leena, mais aussi toutes les questions qui se posent sur les différences culturelles qu’il découvre. Veut-il revenir au pays après sa formation ou va-t-il préférer rester dans son pays d’adoption ? Et que va devenir Leena dans un pays qui juge les femmes et les condamne même si elles sont innocentes ?

J'ai beaucoup aimé le personnage de Piya, la soeur d'Anil, qui, discrètement, va suivre à sa manière les pas de son frère pour essayer de soulager les maux des habitants de leur village.

C’est un excellent roman et j’ai pris beaucoup de plaisir à suivre l’évolution des deux personnages principaux. La fin n’est pas tout à fait celle attendue, mais elle est dans la logique des évènements et s’avère sans doute bien meilleure qu’une fin plus classique, et surtout s’avère plus proche de la réalité que du simple roman.

Cette édition est une édition spéciale, et je dois avouer que j'aime beaucoup la couverture cartonnée épaisse, très colorée et très abstraite, où on ne trouve sur la quatrième que quelques mots clés qui résument vraiment pas mal les thèmes abordés dans l'histoire.