Chloé n’a que sept ans mais elle n’est encore jamais sortie de la cité prison où cinq-cent-mille âmes sont emprisonnées. Elle n’a même jamais mis les pieds en dehors de l’appartement car l’extérieur est dangereux et elle ne doit pas se faire remarquer sous peine de risquer la mort. Elle vit seule depuis six mois avec Locke, son petit frère, qui n'est encore qu'un nourrisson. C’est l’un de ses voisins, qu’elle n’a jamais vu, qui lui laisse des provisions devant la porte, provisions qui lui permettent de survivre.
Ses voisins sont trois repris de justice très dangereux menés par Ross Sandberg, un ancien mercenaire. C’est lui qui laisse la nourriture à la petite fille depuis des mois, mais quand la tempête de neige engloutit la cité, il sait qu’il doit en profiter pour s’évader. Ce qu’il ne sait pas, c’est que Chloé a entendu leur plan, et qu’elle prend la décision folle de les suivre avec son frère sur le dos, et elle escalade le mur à leur suite. Alors qu’elle parvient à les rejoindre, ils sont repérés par les gardes robots — les « Yes Man » — qui blessent la petite fille. Locke tombe alors dans la neige au pied du mur, et Ross entraine Chloé derrière lui en lui promettant qu’il fera tout pour qu’elle puisse revenir le chercher plus tard.
Onze ans plus tard, Chloé est de retour dans la cité prison. Dès son arrivée, elle est plongée dans un monde ultra violent où seul les plus violents survivent. Sur les conseils de Ross, elle part à la recherche de Kerry, un ancien informateur qui aurait peut-être des renseignements sur ce qui a pu arriver à son frère. Le vieil homme refuse tout d’abord de la renseigner, puis il accepte à la seule condition qu’elle élimine une bande d’hommes qui enlèvent des jeunes filles.
Une série en trois tome qui débute avec la présentation de l’héroïne et du monde dans lequel elle va retourner s’enfermer afin de retrouver son frère, sur qui elle a promis de veiller alors qu’il était encore bébé.
C’est un monde ultra violent que nous présente l’autrice, un monde qui n’est clairement pas fait pour les femmes qui sont des proies encore plus convoitées que dans le monde libre. C’est un monde d’ombres et de secrets, de violences mais aussi de rédemption, avec la rencontre de Kerry, qui pleure encore sa petite fille, enlevée et tuée par un gang.
Chloé est une héroïne singulière. Jusqu’à ses sept ans, elle n’a jamais mis les pieds hors de l’appartement où elle vivait avec ses parents, puis elle est prise en charge par un ancien mercenaire qui va tout lui apprendre. C’est un pitch plutôt commun, mais l’autrice s’affranchit de beaucoup d’obstacles en nous évitant les onze ans de formation de Chloé. On va directement à l’essentiel : son désir de retrouver son petit frère, en éliminant tout ceux qui vont se dresser sur son chemin.
C’est le premier manga que publie Shiro Moriya, mais elle fait déjà preuve d’un solide sens de la narration et de la mise en page. Avec des jeux d’ombres et de lumière, et un découpage soigné, elle nous plonge dans un univers glauque et dangereux, dans les rues d’une cité où la mort rôde souvent sur le trottoir d’en face, et là où seuls les plus aguerris et les plus dangereux peuvent survivre. Les scènes de combat de Chloé en deviennent poétiques. On ne voit que quelques mouvements, comme une danse, et la conclusion sanglante de cette chorégraphie.
C’est une superbe réussite du point de vue graphique, et même si la narration ne quitte pas les rails de ce qu’on attend du genre (une héroïne qui se fait des alliés, mais qui veut réussir seule ce qu’elle a entrepris), on s’attache très vite à Chloé et à ceux qui l’entourent. Et on se surprend à détester autant qu’elle ceux qui attendent dans l’ombre.
C’est un excellent manga et une belle surprise pour ce début d’année.