Viviane Cormoran est une océanide. De par sa nature, elle bénéficie d'une affinité profonde avec l'élément aquatique, ce qui lui confère de puissants pouvoirs magiques. En fait, tellement puissants qu'ils sont devenus un peu difficiles à manier ces derniers temps. La jeune femme souhaite apporter un peu de calme et de stabilité dans sa vie, ce qui pourrait passer par l'achat de ce vieux manoir isolé près des berges du Saint-Laurent, quand bien même il semble être le théâtre de phénomènes surnaturels. Manque de chance, une autre acheteuse est sur le coup et ce n'est autre que la Corriveau, une enchanteresse vieille de plusieurs siècles, aussi puissante que mal embouchée. Et comme si ça ne suffisait pas, Viviane a le déplaisir de découvrir le cadavre d'une sorcière dans la piscine en venant visiter les lieux…
Les eaux empoisonnées est un prélude à La coureuse des grèves, série romanesque de Mélanie Dufresne. Il s'agit d'un roman très court, plus proche de la novelette, qui introduit le personnage de Viviane dans l'univers du Windigo, une précédente série de fantasy urbaine de l'écrivaine québécoise. Sa tâche est donc double : présenter les règles de l'univers pour les gens n'ayant pas lu cette série-là et mettre en place la situation de départ spécifique de cette série-ci. Sans oublier de raconter une bonne histoire au passage, si possible !
Dans l'ensemble, le livre s'acquitte bien de ces différentes missions. Son intrigue repose en premier lieu sur la résolution du mystère de l'inconnue de la piscine. Viviane joue donc les enquêtrices, ce qui consiste principalement à interroger des gens les uns après les autres. Nul doute qu'on les reverra dans la suite de la série. Le récit est linéaire, dépourvu de scènes d'action et s'achemine tout tranquillement vers sa conclusion sans jamais susciter de réelle tension narrative. Heureusement, Viviane est une jeune femme attachante, curieuse et inquisitrice, dont il n'est pas déplaisant de suivre les pérégrinations.
L'univers relève quant à lui de la fantasy urbaine classique : il s'agit tout simplement de notre monde à notre époque, si ce n'est qu'il est rempli de créatures magiques qui vivent en secret parmi les humains. Le cadre québécois apportera un certain exotisme pour le lectorat européen, accentué par quelques québécismes dans le style, mais on reste tout de même sur des sentiers bien balisés. À défaut d'originalité, c'est un cadre bien structuré, avec ses deux grandes factions opposées, dont on devine qu'il sera amené à jouer un rôle plus important dans la suite de l'histoire.
Les eaux empoisonnées est un petit roman sympathique, mais tellement léger qu'il peine un peu à tenir debout tout seul. Il aurait peut-être été plus pertinent d'en faire le premier chapitre du premier tome de La coureuse des grèves, car il donne également envie de connaître la suite des aventures de Viviane.
