A travers son premier roman, Akiko Kawasaki nous conte l’histoire d’une famille japonaise sur plusieurs générations d’éleveurs de chevaux à Hokkaido, l’île la plus septentrionale du Japon. Le récit commence à la fin du XIXe siècle avec Sutezô, le fils d’une femme qui a miraculeusement survécu à un hiver rigoureux en mangeant la chair de son cheval, qu’elle aimait tant. Avant de mourir, elle lui révèle ce secret et lui confie une lettre qui raconte son histoire. Sutezô quitte alors son village natal avec son cheval, qu’il considère comme son frère, et part à l’aventure vers Hokkaido, où il espère trouver une terre d’accueil. Sur place, il découvre une nature sauvage et hostile, peuplée de colons venus de tout le pays. Il s’installe dans une ferme isolée au bord de la mer, où il se consacre à l’élevage des chevaux, qu’il considère comme sa famille. Il transmettra sa passion à sa petite-fille, Yuki, qui développera un talent pour le dressage et les soins équins.
Le grand-père et sa petite-fille devront affronter de nombreux obstacles : les difficultés de la vie rurale, les aléas climatiques ou encore l’occupation militaire des Etats-Unis. Mais c’est le chemin de la reconstruction que prendra le pays en empruntant la voie d’une industrialisation à marche forcée qui constituera le défi le plus rude. Les chevaux, progressivement remplacés par des machines, n’auront pour seul horizon que l'abattoir. Un bouleversement sociétal et la menace d'un mode de vie déjà évoqués outre-Atlantique dans Les désaxés, le magnifique et dernier film de Marilyn Monroe (1961) dont l’issue a peut-être influencé l’auteure. Bien des années plus tard, Mika, l’arrière-arrière-petite-fille de Sutezô, cherchera à retrouver les traces des chevaux de son aïeul lors d’un périple qui prendra alors la forme d’une quête identitaire.
Des chevaux et du vent est un premier roman âpre, qui nous fait voyager aux confins de l’île sauvage d’Hokkaido. La première partie aurait pu s’intituler Contes cruels de la jeunesse, comme le film éponyme de Nagisa Oshima. Une autre référence d’Akiko Kawasaki ? Quoi qu’il en soit, elle nous livre ici un hymne à la nature, aussi majestueuse que menaçante, et célèbre les chevaux à travers un vibrant hommage prenant parfois une dimension fantastique. C’est aussi l’histoire d’une famille qui, malgré les obstacles de tous ordres, continue de préserver ses valeurs et son amour inconditionnel des chevaux.
