Dans ce nouveau numéro de la revue québécoise, on trouve, comme à l'accoutumée, des nouvelles, et des critiques d'oeuvres parues dans l'univers francophone. Le volet Fictions est composé de :
Lecture complice, de Michèle Laframboise : Dans le monde où vit celui qui ne s'appelle pas vraiment Romain Scary, seules les IA ont le droit d'écrire. Pour autant, "Romain" ne renonce pas à trouver d'autres oeuvres originales, d'autres créées par d'autres créateurs ou créatrices humain.es, d'autres résistant.es. L'autrice manifeste à nouveau dans cette nouvelle son talent à brosser tout un univers en quelques traits, comme une aquarelle, et le thème de la résistance à une dictature qui ne dit pas son nom ne peut que résonner, de nos jours.
De l'intérieur, de Frédéric Parrot : Cette nouvelle qui tient du récit de cauchemar ou d'expérience de déprivation sensorielle est habilement écrite, mais je n'ai pas vraiment compris de quoi il était question, et pour ma part je suis restée... à l'extérieur.
Une place au paradis, d'Annie Tenaglio : Redcine ne veut pas d'enfant. Mais les éleveurs deviennent impatients, et il n'est pas dit qu'elle puisse plus longtemps leur résister. Le retournement de situation, avec les humains vus comme du bétail, n'est pas inouï, mais l'histoire est bien racontée et plaisante à lire.
Par-delà la Mer et le Ciel, de Sébastien Chartrand : Il y a plus que l'océan entre l'Ancien et le Nouveau-Monde, mais le capitaine Martinez est expérimenté. Cette nouvelle rappelle les mythes ayant entouré la géographie terrestre avant que la planète soit totalement explorée pour mieux en jouer. L'idée est originale, pour le coup, pas du tout pratchettienne, même si bien sûr on ne peut qu'y penser, et elle est bien écrite, avec des personnages bien construits. Il n'y a rien d'étonnant à ce qu'elle ait inspiré la superbe illustration de couverture d'Erick Lefebvre.
L'indifférence et la raideur, de Claude Lalumière : Il s'agissait au départ de protéger les mineurs des prédateurs sexuels, en les rendant indifférents. Les conséquences sont inattendues. Une autre excellente nouvelle, et une idée originale pour la fin du monde, ou du moins de l'humanité.
Cet endroit qu'on doit protéger, de Dave Côté : Marc vient à peine de finir le dîner quand quelqu'un arrive en demandant des nouvelles de l'ancien propriétaire, et en expliquant qu'il y avait des affaires à lui dans la maison. Marc les lui donne, l'inconnu s'en va. Fin de l'histoire. Vraiment ? Il me semble avoir déjà rencontré cette idée ailleurs, mais cette fantasy urbaine (plutôt campagnarde, d'ailleurs, en l'occurrence) n'en est pas moins très agréable à lire, à la fois réaliste et rêveuse.
Dans ses Carnets du Futurible, intitulés Montréal atomique, Mario Tessier raconte l'histoire des recherches sur l'énergie atomique, et ses usages civils et militaires, au fil du temps. Comme à l'accoutumée, il recense les productions culturelles avec ce thème, en les mettant en regard avec l'Histoire. L'accent est bien sûr mis sur le Canada, comme le titre suffisait à l'indiquer, et c'est une raison supplémentaire pour les non-canadiens de le lire, car en ce qui me concerne j'ai appris une infinité de choses dont je n'avais pas la moindre idée.
L'article du DALIAF de Claude Janelle est consacré cette fois à un jeune auteur, Christian Guay-Poliquin, en général et à son premier roman, Le fil des kilomètres, en particulier.
Enfin, la partie critique en deux volets est riche, et j'y ai relevé notamment Léopard noir, loup rouge, de Marlon James, qui semble intrigant, et l'anthologie Hypermondes, que je prévois de me procurer. Nul doute qu'un.e autre lecteur/lectrice de la revue trouvera d'autres pistes dans ce volet toujours bien fourni.