Les Chroniques de l'Imaginaire

Nous sommes la poussière - Serves, Plume D.

Pendant longtemps, Elias ne sait pas pourquoi ses oreilles se bouchent ni pourquoi elle est aussi fatiguée en quasi-permanence, entre autres symptômes pénibles. Alors qu'elle a dû arrêter ses études de fac à cause de son état, le diagnostic est enfin posé : elle est magnétophile. Cela signifie que son corps attire les particules magnétiques présentes dans l'air environnant, et que leur densité peut parfois l'empêcher d'entendre, ou de respirer assez largement.

A partir de la promulgation de la loi Gers, les magnétophiles ont l'obligation de porter une chaîne de cheville qui, reliée au réseau souterrain, draine les particules magnétiques. Cela a comme inconvénient majeur de limiter les déplacements des magnétophiles, sans compter les irritations cutanées provoquées par le contact permanent des chaînes. Heureusement, la reprise de contact d'Elias avec un ancien prof de fac dont elle aimait les cours va lui permettre de trouver une solution alternative, avec l'aide aussi de son amie d'enfance Léandre et le fils de cette dernière, Quentin.

Le thème du roman est intéressant, en mettant en relief comment des personnes en souffrance peuvent être traitées comme si elles étaient coupables de leur pathologie et des effets que celle-ci peut avoir sur les gens et le monde qui les entourent. Outre l'histoire d'Elias, racontée chronologiquement, il est constitué de la vie et de la carrière d'une personne qui a travaillé à l'élaboration des mailles, ce qui bien sûr présente un point de vue totalement différent sur la magnétophilie, matérialisé par l'emploi de la première personne. Enfin, une troisième chaîne d'intrigue tressée avec les autres est une adresse chorale à différents personnages non identifiés, magnétophiles ou magnétosains, dont on voit les différents rapports avec les particules. De ce fait, le lecteur a un tableau pointilliste mais complet de la situation française pour ce qui concerne la maladie et l'évolution du regard porté sur elle et ses vecteurs.

L'aspect militant du roman est une évidence : les personnages principaux sont tous des femmes, pour la plupart lesbiennes. L'éditeur le présente comme une parabole sur l'autisme, et il représente sans doute bien comment les personnes handicapées peuvent être invisibilisées et stigmatisées, surtout si leur handicap n'est pas à l'évidence visible, ou si elles n'appartiennent pas à la classe sociale, à l'orientation sexuelle, ou à la couleur de peau dominantes. Ce n'est pas vraiment gênant, du fait que c'est bien écrit, avec une évolution bien gérée des personnages et de la situation ambiante, la dystopie de départ évoluant lentement vers des aspects utopiques.

Pour ma part, j'ai été vraiment gênée par le manque de relecture attentive, qui a laissé passer des fautes d'orthographe aussi énormes que "de veines (sic !) batailles", et le fait que l'emploi du conditionnel présent est systématique à la première personne du singulier là où on attendrait l'emploi du futur. Toutefois, si vous n'êtes pas aussi sensibles que moi à la forme, c'est un roman qui fait réfléchir et qui est intéressant.