Depuis le pont d'un paquebot qui traverse l'Atlantique, Gustav Mahler, affaibli par la maladie, contemple l'océan et se souvient. Il repense à son enfance, à son épouse qui est plus bas dans le bateau, à leur fille qui est avec elle, à leur aînée, décédée. Il se souvient de son œuvre, en tant que compositeur et en tant que chef d'orchestre réputé. Les voyages et les rencontres que cela lui a permis de faire.
Maintenant qu'il sent la mort venir à lui, il prend le temps de regarder en arrière. Son destin a été compliqué par une santé fragile, depuis sa plus tendre enfance. Malgré tout il est entré au conservatoire et a eu l'occasion de rencontrer Alma, l'amour de sa vie, de dix-neuf ans plus jeune que lui. Ils ont eu des hauts et des bas mais elle est toujours là et l'a suivi de l'autre côté de l'océan pour sa carrière, bien que cela lui eût coûté de mettre la sienne propre entre parenthèses.
Le récit suit le va-et-vient du mouvement du bateau, ce dernier mouvement qui donne son nom au roman, celui de la musique intérieure du compositeur. Un mouvement léger, qui passe d'une époque de sa vie à une autre, captée par une scène en particulier. Cela donne l'impression de feuilleter un album photo qui rappelle un souvenir à chaque nouveau cliché, sans tout révéler de ce qui est hors cadre.
On peut légitimement reprocher à ce roman de rester à la surface des choses, de donner accès à des bribes de la vie de Gustav Mahler sans nous faire entrer pleinement dans sa biographie. Mais il ne me semble pas que là était l'objectif de Robert Seethaler. En livrant un texte court et en jetant un éclairage sur les moments clés de la vie de Gustav Mahler, il donne toute la place à la poésie et à la mélancolie de s'exprimer. Plus que les évènements, c'est l'émotion qui prime.
Grâce à une langue toujours aussi mélodieuse et délicate, Robert Seethaler dresse le portrait de l'homme en aquarelle : les contours sont flous, mais c'est justement ce qui fait la beauté du roman.