Le théâtre est un des arts que je préfère. Je savais que me replonger alors dans la vie de Feydeau via cette biographie de Violaine Heyraud allait être un plaisir. Mais c'est allé au delà, car je le confirme, ma passion du vaudeville est à nouveau réapparue après avoir refermé ce livre. Les portes qui claquent, les trahisons, les quiproquos, le jeu des amants est un pur bonheur à revoir sur scène. Nous avons eu la chance en France de compter ce grand homme parmi les auteurs de notre littérature : Georges Feydeau, le Rénovateur du Vaudeville.
Violaine Heyraud s'intéresse dans les premières pages à son père : Mr Ernest Feydeau, ami de Gustave Flaubert, de Théophile Gauthier et des frères Goncourt. Il perce tant bien que mal en dramaturgie, avec quelques succès mais sans grand lendemain. Il épousera en second mariage en 1862 Léocadie avec qui il aura son fils, Georges. Sa mère a la réputation d'être très volage et son père acquiesce et en profite grandement.
Georges Feydeau est passionné de théâtre dès son plus jeune âge. Il faut dire que, pendant sa jeunesse, il grandit dans un milieu littéraire, fait de rencontres par son père on ne peut plus ciblées. Il se mariera en 1890 avec Marie-Anne Durant, aura trois enfants Germaine, Jacques et Michel auxquels il vouera une profonde admiration tout au long de sa vie, il sera près proche d'eux même après la séparation de sa femme quand il décidera de vivre à l'hôtel Terminus. Il s'éteindra à l'âge de cinquante-huit ans après avoir eu la syphilis, comme Beaudelaire et Maupassant, et ayant perdu la tête, ses enfants décideront de le placer dans un sanatorium à Rueil Malmaison. En 1921, quand il tire sa révérence à la vie, on dira que "cette mort jette un crêpe noir sur Paris".
Sa première pièce, il l'écrit en 1882 : Par La Fenêtre. Son instinct le porte vers le rire et il créera le vaudeville tel qu'on le connaît aujourd'hui : un mélange de parodie, de farces, de Commedia dell'arte, de fantaisies bouffonnes et de satires sociales avec une dose de provocation. Les débuts seront difficiles, il faudra alors trouver le mot juste pour plaire au tout Paris, et ce sera le cas.
Feydeau veut amuser son public, il refuse de le heurter, souhaite éviter de passer pour un provocateur. Il a comme maître et modèle l'auteur dramatique Victorien Sardou. Il aime ses comédiens et appréciera énormément Armande Cassive, une de ses actrices préférées jouant souvent le premier rôle dans ses pièces. Maurice Desvallières, homme de lettres, sera souvent à ses côtés comme co-auteur à ses débuts avant de se brouiller pour quelques temps.
Ses pièces les plus célèbres : Tailleur pour dames, Un fil à la patte, Monsieur Chasse, Le système Ribadier, L'Hôtel du libre échange, Le dindon, La dame de chez Maxim, La main passe, Le Bourgeon, La puce à l'oreille...
C'est un homme respecté et respectueux des autres, quelles que soient leurs origines, il joue aussi les esthètes, c'est un homme très élégant qui se passionne pour l'art mais aussi les jeux d'argent. Il ne fera par contre jamais d'excès au niveau santé, il a horreur du vin et boit uniquement du Vittel-cassis même s'il vit plus la nuit que le jour. Il sera riche par toutes ses représentations théâtrales, ses droits d'auteurs à l'étranger et les publications écrites de ses oeuvres mais courra toujours après l'argent car c'est un dépensier.
Ami d'Alfred Capus, de Tristan Bernard et de Lucien Guitry (père de Sacha Guitry qu'il aidera à ses débuts), il est aussi un contemporain d'Anatole France et de Zola. Il connaît le succès en banlieue, en Province et au-delà des frontières tel qu'en Angleterre, aux Etats-Unis et jusqu'au Brésil. Il restera de lui de célèbres citations, car cet écrivain solitaire et mélancolique avait une excellente répartie.
Merci à Violaine Heyraud d'avoir partagé à nouveau la vie passionnante de cet auteur talentueux qui restera toujours en tête d'affiche de nos plus célèbres théâtres parisiens toujours debout à cette heure et cités tout au long du livre, tel que le théâtre du Palais royal, le théâtre de la Renaissance, le théâtre des Nouveautés, édifices tellement chargés d'histoires et toujours aussi importants de nos jours nous donnant l'occasion de nous divertir et de rêver.
Elle n'oublie rien que ce soit côté personnel et côté public concernant la vie de cet immense auteur français. Cette biographie est complète, riche, sans longueur, tout y est intéressant quand on apprécie le monde de la scène. A la fin, on peut y retrouver des annexes comme des notes sur l'édition, des repères chronologiques, des références bibliographiques et toutes les notes explicatives. Je me suis régalée avec quelques petites anecdotes comme le fait que ce soit Feydeau qui donne la première chance à Raimu cherchant un acteur avec l'accent du sud, et puis aussi quand Violaine Heyraud relate le fait qu'à la vue d'un des premiers films de Chaplin, il rêvera d'écrire pour lui et de le rencontrer, sans oublier quelques citations subtiles de ce vaudevilliste. Alors je parle aux amoureux du théâtre français, lisez cette biographie, retournez au théâtre pour oublier votre quotidien, nous le devons bien à ces célèbres auteurs tel que Monsieur Georges Feydeau.