Les Chroniques de l'Imaginaire

Les Jeux Nobiliaires (Sommeil des dieux - 3) - Gévart, Pierre

Le voyage du vaisseau de colonisation Prométhée doit durer deux millénaires avant l’arrivée sur la planète cible. Le temps s’est écoulé, le départ de la Terre date désormais de six siècles. 

Si les technos qui vivent dans les zones techniques de l’entre-cuir-et-chair et assurent l’entretien ont toujours conscience qu’ils vivent dans un vaisseau, les passagers de l’intérieur préfèrent parler de monde. Le but du voyage est si lointain qu’il semble ne pas les concerner.

Le pouvoir est entre les mains de la royauté, les descendants des Arbogast. Le Baron-Commandant Ballister a la main mise sur la partie technique, mais doit plier devant les caprices de l’intérieur ; l’Eglise ne compte guère.

Pourtant, la stabilité du Prométhée est sur le point de voler en éclats. Le roi Rhone le onzième est mourant, et sa succession pose question. Son fils et héritier naturel Rhone le douzième est proche des technos, dont il partage souvent le quotidien, aussi n’a-t-il aucune crédibilité en dedans. Deux nobles aux dents longues, le prince Steve et le duc Ariès, convoitent le trône et sont en rivalité constante sans que l’un des deux se démarque.

Dans Les Jeux Nobiliaires, on retrouve donc les occupants du Prométhée trois siècles après Arrêt sur soleil. Le récit se concentre sur les plus proches héritiers du trône et leurs proches, ainsi qu’une poignée de technos et de religieux. On ne peut que supposer que le reste de la population vit plutôt paisiblement, sans histoire. Comme toute noblesse terrienne, les nobles du Prométhée cherchent le pouvoir et les privilèges, sans excès : « les nobles, quand on leur donne les moyens de ne rien faire dans le luxe, vous fichent la paix.»

Le récit nous montre comment un accident lors des fameux Jeux Nobiliaires (permettant de désigner le noble le plus sportif et intelligent) va cristalliser les tensions entre les technos et les nobles, ainsi qu’entre les nobles eux-mêmes. Personne ne compte céder la moindre parcelle de pouvoir, quitte à user de la force pour convaincre son voisin. S’acheminerait-on vers une guerre, qui constituerait du jamais vu à bord du Prométhée ?

Entre les moments d’action violente s’intercalent des moments où chacun peut s’adonner à son activité favorite : comploter, manipuler, dissimuler... L’humanité dans ses travers les plus sombres. Les personnages ne sont pas très plaisants : le jeune Rhone a mis de côté ses responsabilités royales et semble bien naïf ; Steve et Ariès courent après le pouvoir de manière souvent puérile ; Ballister a une morale un peu trop élastique… Il est pourtant intéressant de suivre ce qu’il advient dans le vaisseau-monde voyageur.

A noter que la relecture est plus aboutie que dans les deux tomes précédents, malgré quelques rares défaillances : on a certes parfois affaire à des phrases bancales avec des mots en trop ou en pas assez, ou des échanges de noms entre personnages présents et absents, mais cela reste l’exception et la lecture n’en est pas dérangée.

Le livre est court et bien écrit, ce qui en fait une lecture agréable qui saura sûrement séduire les lecteurs qui ont aimé le début de la saga.