Les Chroniques de l'Imaginaire

Flamboyant crépuscule d'une vieille conformiste - Pirotte, Emmanuelle

En apprenant qu'elle souffre d'Alzheimer, à quatre-vingt-un ans, Dominique Biron décide de partir à son heure et à sa façon : c'est dit, dans trois jours, à 20h00, elle tirera sa révérence. Elle profite du temps qu'elle s'est laissé pour préparer son départ, revenir sur sa vie, dire adieu aux souvenirs de sa fille chérie, Dorothée, morte trop tôt, et à la fille de celle-ci, Victoire. Elle n'éprouve pas vraiment de regrets à l'idée de quitter son fils aîné John ni sa fille Catherine, dont les enfants lui indiffèrent quand ils ne l'exaspèrent pas.

Pendant trois jours, le lecteur accompagnera cette vieille dame indigne, qui osera enfin cesser de se conformer aux attentes de la société dans laquelle elle est née.

Ce roman court et vite lu est écrit de façon limpide. Je ne connaissais pas cette autrice, et j'essaierai sans nul doute d'en lire une autre oeuvre, son style incisif étant plaisant à lire. Il est aisé d'entrer dans la tête du personnage, et de s'identifier à lui jusqu'à éprouver le mépris et l'antipathie qu'il éprouve pour soi-même : Dominique Biron déteste tout ce qu'elle est, depuis son prénom et son nom jusqu'à la lâcheté qui l'a gardée toute sa vie dans les rails fixés par ses parents et par un mari qu'elle a très vite cessé d'aimer.

Le roman expose sans s'y attarder ces thèmes lourds que sont la fin de vie, et le droit de la choisir comme on la veut, le suicide, la vieillesse et ses corollaires - déchéance physique, aliénation mentale, dépendance -, la façon dont une partie de la population a été empêchée de vivre normalement pour en protéger une autre pendant l'épidémie de Covid, l'incommunicabilité, le poids des normes sociales, et l'amour que nous portons ou non à nos enfants et petits-enfants. En somme, un beau ramassis de tabous sociaux sont ici effleurés.

C'est certes fait sans lourdeur, mais aussi sans profondeur, et je ne suis pas sûre qu'il me restera grand-chose de cette lecture passé quelques semaines. Peut-être qu'une lectrice plus jeune en retirerait davantage matière à réflexion.