Les Chroniques de l'Imaginaire

Honorine - Balzac, Honoré (de)

Lors d'une soirée mondaine à Gênes, alors que l'atmosphère se veut romantique et paisible sur une terrasse au coucher du soleil, un consul raconte une histoire qui lui est arrivée il y a quelques années. Alors qu'il était jeune homme, son oncle l'abbé Loraux le fait entrer au service du comte Octave en tant que secrétaire. Le comte le prend sous son aile et agit en tant que nouvelle figure paternelle, prenant la relève de l'abbé. Octave et Maurice s'entendent à merveille mais le jeune homme ne peut que constater que son employeur est en proie à des accès de mélancolie inexpliqués. Il en comprend un jour la raison, qui est le sujet central de la nouvelle.

L'épouse d'Octave l'a quitté pour s'enfuir avec son amant. Ce dernier l'a à son tour abandonnée et elle vit désormais non loin du comte, alors que tout le monde pense qu'elle a disparu lors d'un voyage à l'étranger. Mais Octave, lui, sait qu'elle est bien vivante. Mieux encore, il maîtrise sa vie, lui ayant fourni son foyer et ses moyens de subsistance, commandant son entourage, sans qu'Honorine n'ait le moindre soupçon. Jusqu'au jour où, ne pouvant plus supporter de voir la femme qu'il aime loin de lui, Octave demande à Maurice d'entrer en contact avec Honorine.

Cette nouvelle méconnue d'Honoré de Balzac aurait été écrite en trois jours, pour des besoins pécuniaires, l'auteur ayant toujours eu pour habitude de vivre au-dessus de ses moyens. Il a malgré l'urgence pris soin de l'inscrire dans sa grande œuvre de La comédie humaine en y insérant de nombreux personnages récurrents et en lui donnant une puissance romanesque digne de son talent.

Honorine est une héroïne étonnamment moderne pour l'époque. Elle reste attachée aux valeurs et morales de la religion chrétienne mais se montre assez émancipée pour satisfaire son besoin de liberté. La société, la loi, la religion veulent qu'elle soit épouse et retourne aux côtés de son mari. Sa conscience lui enjoint de n'en rien faire. Balzac prend ainsi fait et cause pour la femme et pointe du doigt le caractère dominateur de l'homme, sans caricature ni mépris. Car Octave semble être un homme réellement doux, aimable et amoureux. La volonté d'Honorine est ainsi bien plus frappante que si elle fuyait un homme froid et cruel.

Lire un texte de Balzac n'est jamais décevant, preuve en est faite cette fois encore. Si l'histoire elle-même n'est peut-être pas la plus captivante qu'il ait pu écrire, la figure forte et volontaire de la femme qui dit non donne à Honorine une saveur très appréciable.