Les Chroniques de l'Imaginaire

Les fleurs d'Hiroshima - Morris, Edita

C’est avec ces mots que Maurice Pons termine la préface glaçante qui retrace en quelques pages l'histoire de la bombe qui a été larguée sur Hiroshima en ce matin du 6 août 1945. Et qui, au passage, nous explique le titre de ce court roman où les fleurs sont des hommages à ceux qui se sont jetés, en flamme, dans le fleuve.

Yuka vit avec son mari Fumio et sa petite sœur Ohatsu à Hiroshima, dans une petite maison plus que spartiate. Afin d’arrondir leurs fins de mois, Yuka prend, pour la première fois, un pensionnaire. Celui-ci est un jeune homme américain qui voyage pour la première fois au Japon. Et plutôt que de prendre une chambre dans un hôtel aseptisé, il a préféré choisir un hébergement chez l’habitant, afin de se rapprocher au plus près de la culture japonaise.

Ce que Sam ignore, au début de l’histoire, c’est que la famille de Yuka a durement été touchée par la bombe atomique, quinze ans plus tôt, et qu’ils cachent leurs blessures sous leurs vêtements. Yuka ne veut pas qu’il le sache pour plusieurs raisons, et surtout par honte de ce qu’il pourrait penser d’eux. Au fil des quelques jours que Sam va passer chez eux, il va découvrir le véritable visage du Japon ravagé par la bombe.

Un roman court, mais un roman qui ne peut pas laisser indifférent. Prix Albert Schweitzer en 1961, il est l’un des rares ouvrages à parler de cette période particulière, et à aborder les conséquences de la bombe sur les populations locales. En effet, les Japonais d’Hiroshima ont été stigmatisés et surtout invisibilisés de force par les autorités, qui ont interdit de parler de la bombe et de ses conséquences.

Avec une délicatesse rare, Edita Morris nous montre une facette ignorée de l’histoire japonaise, par le biais de Yuka et de sa famille, et on suit, avec le cœur serré, leur vie quotidienne dans un pays qui s’efforce de les oublier.