Snif : GandahaR, c'est fini ! Après trente-huit numéros et dix années de bons et loyaux services, la meilleure revue de littératures de l'imaginaire du Massif central tire sa révérence. C'est toujours triste de voir disparaître une publication de qualité. Histoire de mettre un beau point final à cette histoire éditoriale, cet ultime numéro propose de retrouver une douzaine d'autrices et auteurs ayant déjà contribué à la revue par le passé.
On commence avec Sur le bord de Christine Renard, une autrice régulièrement republiée dans le magazine qui lui a consacré un numéro spécial, le 16. En seulement deux pages, on découvre une histoire d'amour et de mort à la puissance évocatrice concentrée.
L'anglophone Nina Allan est la seule à n'avoir jamais vu son nom au sommaire d'un précédent numéro. Son Terminus prend place dans le métro de Moscou, mais rien à voir avec l'univers post-apocalyptique de Métro 2033 : c'est du fantastique subtil et évanescent, très finement travaillé.
Martine Hermant, membre du comité de lecture de la revue à qui elle a offert de nombreux textes, propose un autre nouvelle courte et poétique, Mission Lempicka.
On arrive sur des textes plus charnus avec La vivace odyssée de Kevyan Zadoune de Bruno Pochesci, contributeur actif des débuts de la revue mais absent depuis le numéro 21. Je n'ai pas accroché à cette pochade sur un joueur de football égocentrique plongé dans une apocalypse où presque toute l'humanité a disparu, la faute à un humour assez balourd et constellé de références forcées à l'actualité.
Dans Plus jamais seule, Pierre Brignon (déjà lu dans le numéro 35) propose une réflexion science-fictionnelle sur la commodification de l'humanité au bénéfice des riches et des puissants. C'est classique dans le fond comme dans la forme, mais ça fonctionne bien sans s'éterniser.
On reste dans la SF avec Quiàn de JC Gapdy, que l'on avait croisé dans le numéro précédent. C'est une histoire plaisante de premier contact et d'essaimage interplanétaire, avec de vrais morceaux d'igbo dedans.
Les frères Brice et Romain Le Roux (apparus dans le numéro 28) imaginent dans Le cri d'un forêt un futur où l'humanité a converti des biomes entiers en super-ordinateurs, au mépris de la souffrance animale et végétale. C'est une belle fable écologique très bien fichue.
J'ai moins accroché à Paradis, artifices... et elle de Nicolas de Torsiac (deux contributions jusqu'ici, dans les numéros 32 et 35). Le récit est bien mené, mais son protagoniste, un odieux liquidateur immobilier, est singulièrement déplaisant. Ce n'est pas la manière dont une maison mystérieuse le renvoie à son innocence juvénile qui le rend plus attachant.
Retour à la SF avec À l’article de la mort de Wilfried Renaut, déjà publié quatre fois dans la revue, dont les numéros 27 et 28. La fin du monde est proche et le salut de l'humanité pourrait passer par le transfert des consciences humaines dans des robots. C'est très cynique et brutal, peut-être la nouvelle la plus sombre de ce numéro.
Anthony Boulanger, l'un des auteurs les plus fréquents de GandahaR (il est de presque tous les numéros depuis le 32), casse les codes avec Réactions en chaîne, une histoire où les feux d'artifice se parent tour à tour de la magie de la fantasy ou de la rigueur de la science-fiction. Prenant.
Comme en écho au premier récit de la revue, l'amour et la mort s'entrecroisent dans Helminthe, un ravissant petit conte cruel de Céline Maltère, elle aussi habituée des récents numéros.
Pour finir, c'est un Philippe Caza égal à lui-même qui nous emmène dans Le jardin de Blanche-Neige. C'est évidemment une parodie grivoise du conte des frères Grimm, illustrée par l'auteur, cela va de soi.
Après les habituelles revues de lecture, on trouvera en fin de numéro un index des contributrices et contributeurs de GandahaR. Pratique dans l'éventualité où vous voudriez commander d'anciens numéros : la boutique en ligne de l'association restera ouverte jusqu'au mois de septembre 2024.