Les Chroniques de l'Imaginaire

Entre les lignes - Mermoux, Dominique

Dans une malle appartenant à son père décédé, Jean tombe sur des lettres adressées à une inconnue, qui s’appelle Anne-Lise. Chaque 3 avril, il lui a écrit, la surnommant « ma petite souris ». Il lui raconte sa vie, depuis son enfance. Son père mort pendant la première guerre, sa mère avare de tendresse, son gentil beau-père, ses copains, sa première histoire d’amour…

Tout cela, Jean n’en savait rien. Son père Moïse, un taiseux qui se perdait souvent dans ses pensées, n’en a jamais parlé. Après avoir lu ces lettres rassemblées en carnet, il déprime, broie du noir. Son fils, Baptiste Beaulieu, décide alors d’essayer de percer le mystère autour de cette Anne-Lise en se rendant sur les lieux listés dans les carnets, à la rencontre des descendants des personnes qui ont fait partie de la vie de son grand-père.

Les efforts du médecin aujourd’hui célèbre paient peu mais, pour redonner le sourire à son père, il enjolive ses découvertes.

Le roman graphique mène donc en parallèle deux récits, celui de la quête de Baptiste Beaulieu et celui des lettres de Moïse, qui occupent une bonne partie des planches et sont agrémentées de jolies et douces illustrations. Moïse raconte toute sa vie et on comprend peu à peu qui était sa petite souris. Son secret qu’il n’a jamais révélé, c’est une magnifique histoire d’amour abîmée par la guerre. Ce qu’il a vécu et raconte à travers ses lettres (les deuils, un mariage malheureux, la captivité en Allemagne…) rend compte d’une existence lourde de tristesse malgré la chaleur de son amour, une première partie de sa vie sur laquelle il a jeté un mouchoir lorsqu’il a épousé la grand-mère de Baptiste.

Cette histoire vraie est bouleversante et romanesque, très émouvante. On se demande comment Moïse a pu garder son secret aussi longtemps dans son cœur sans jamais en parler. En continuant à vivre malgré tout. Son histoire est déchirante.

D’abord raconté par Basptiste Beaulieu dans Toutes les histoires d’amour du monde (éditions Mazarine), Dominique Mermoux a su donner corps à ce récit en y apportant beaucoup de douceur et d’émotion. Les aller-retours entre le présent et le passé s’alternent harmonieusement et on se laisse couler facilement dans cet album dense et poignant. Une adaptation parfaitement réussie.