Les Chroniques de l'Imaginaire

Terminus Copponi (Sommeil des dieux - 6) - Gévart, Pierre

Vingt siècles après que le Prométhée ait quitté la Terre, les souvenirs essentiels relatifs à la mission se sont perdus, tantôt oubliés, tantôt amalgamés à des élucubrations fantaisistes, transformés en un gloubi-boulga bizarre dans lequel il est imposible d'identifier le vrai du faux. L'obscurantisme règne. La plupart des habitants du vaisseau-monde ne croient pas à l'existence de soleils et de planètes où l'on puisse vivre à la surface extérieure ; seul existe pour eux leur propre monde, le Monde-Prom't. 

Un jour pourtant, les Lukarns, ces illuminés qui passent leur vie le nez collé à l'unique hublot permettant de voir l'espace à l'extérieur, indiquent qu'une nouvelle étoile est apparue et que le vaisseau se dirige vers elle. L'évidence devient impossible à ignorer quand le Prométhée est agité, de plus en plus souvent, par de violentes secousses : le vaisseau ajuste sa trajectoire et ralentit pour rejoindre sa cible.
Seuls les Sullertiens refusent de prendre en compte les faits, leur esprit borné par la doctrine à laquelle ils adhèrent. Malheureusement, ces fanatiques sont extrêmement nombreux, et bien décidés pour des motifs religieux à empêcher quiconque de réveiller les pilotes endormis, alors que ceux-ci sont pourtant toujours soigneusement veillés comme des dieux.

Des pilotes disponibles, à qui on ne fera pas appel. Des navettes en quantité, que l'on n'utilisera pas. Des catastrophes successives, qui dévastent l'intérieur du vaisseau... Voilà le Prométhée bien mal barré pour son ultime aventure !

Terminus Copponi achève la saga du Sommeil des Dieux, avec la fin du long périple du Prométhée. Ce voyage se termine sur Copponi, que ses habitantes appellent Khopne, achevant ainsi également l'autre saga de l'auteur dédiée à cette planète-là.

Il peut sembler curieux de prime abord que l'ouvrage commence par une nouvelle d'une autre autrice : Jour de traite, par Raphaëlle Gayon. Pourtant, ce texte publié initialement dans la revue Galaxies SF #69 en 2021, remanié pour l'occasion, introduit parfaitement la situation sur la planète Khopne : les femmes ont pris le pouvoir et ne considèrent plus les hommes que comme du bétail tout juste bon à produire la précieuse semence indispensable à la survie de l'espèce humaine. A priori, ce n'est donc pas une destination très sympathique pour une société mixte comme celle du Prométhée.

Mais déjà faudrait-il que les Prométhéens arrivent jusque-là ! Comme dans les tomes précédents, on découvre le destin du Prométhée à travers les péripéties vécues par une poignée de personnages. Les crises se succèdent, chacune empirant une situation déjà difficile. Le long voyage avait été compliqué, voyant la société des voyageurs régresser et subir de nombreux bouleversements, mais l'arrivée est plus éprouvante encore et ne laissera personne indemne.

Si je suis contente de découvrir la fin de ce voyage qui paraissait parfois interminable, je suis un poil déçue. En mode "tout ça pour ça ?" devant ce soufflé qui retombe à toute vitesse. Je pense à ce qu'il advient des Arbogast, que l'on suit depuis le début de l'épopée, aux pilotes survivants, à Obote (l'ex-dirigeant de Khopne) et à tous les autres... Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'auteur n'est pas tendre avec ses personnages à qui il impose un devenir bien sombre. Alors certes le récit est riche en péripéties et dangers avec des rebondissements inattendus, mais l'ensemble est légèrement déprimant, même si ce pessimisme n'est malheureusement pas incohérent avec la nature humaine...

Un beau final pour une saga au (très) long cours !