Laura Andrews a disparu. Cette jeune femme souffre de graves lésions cérébrales et a passé toute sa vie dans un institut spécialisé. Impossible qu'elle ait fugué : il s'agit forcément d'un enlèvement. Mais quel peut bien en être le mobile, et qui en est responsable ?
Chargé de retrouver Laura, le détective Nick Stavrianos oriente rapidement ses recherches vers la Nouvelle Hong Kong, cité-État indépendante dans le nord du continent australien. Pour résoudre ce mystère, il va lui falloir toute l'aide de ses modifications cérébrales, ou mods, qui augmentent ses capacités dans divers domaines. Il va découvrir que la disparition de Laura a un lien avec la Bulle, cette mystérieuse sphère qui enveloppe le système solaire depuis plusieurs décennies et l'isole complètement du reste de l'univers… avec peut-être à la clef le moyen de s'en affranchir.
Greg Egan a le chic pour écrire des romans qui vieillissent remarquablement bien. Difficile de ne pas penser aux implants Neuralink d'Elon Musk en lisant la description des effets des divers mods (toujours cités avec leur prix TTC, pour la blague) qu'utilise le protagoniste d'Isolation, un livre pourtant paru il y a plus de trente ans !
Le récit est conçu de manière curieuse. On suit en permanence Nick, un détective dépressif comme la littérature de genre en a déjà produit des milliers, mais l'enquête policière assez classique qui occupe le premier quart du livre (une familiarité qui permet d'introduire en douceur les concepts de physique quantique sur lesquels reposent l'intrigue) bascule ensuite vers quelque chose d'assez différent, sans être moins bon pour autant. La tension, savamment alimentée par des réponses qui ne font que poser d'autres questions, monte crescendo jusqu'à une apothéose psychédélique aussi inattendue que complètement justifiée.
Aux gens que l'étiquette « hard SF » souvent accolée au nom de l'écrivain australien effraierait, sachez que si les explications des mécanismes scientifiques qui sous-tendent l'intrigue menacent par moments de sombrer dans un abîme de jargon inaccessible au commun des mortels, c'est suffisamment rare et ponctuel pour ne pas entraver le plaisir de lecture.
Et grâce à l'imagination aussi débridée que méthodique de Greg Egan, du plaisir de lecture, Isolation en offre une belle dose.