Mon cher mari est un recueil de nouvelles qui tournent toutes autour de la place de la femme dans la vie de famille, en se penchant avant tout sur son statut d'épouse, sans pour autant oublier le rôle assigné de mère. Les onze textes ont beau porter sur le même sujet, ils sont très différents et pointent du doigt les travers des hommes. C'est fait sans méchanceté et avec beaucoup d'humour, que d'aucuns pourraient peut-être trouver vulgaire si on s'attarde sur des passages spécifiques. Mais le ton et les histoires forment un ensemble harmonieux. Après tout, un mari qui mis devant le fait accompli continue à nier qu'il trompe sa femme en la traitant d'idiote et de folle ne mérite pas qu'on prenne des pincettes.
C'est un plaisir de découvrir chaque nouvelle histoire. On se demande sur qui on va tomber, ce qui va se passer. L'imaginaire de Rumena Bužarovska réussit la prouesse de proposer des nouvelles qui sortent de l'ordinaire en restant dans un cadre qui est lui ordinaire, commun, familier.
On pourra retenir Mon mari, le poète pour l'amour qui se délite au fil des ans. Quand ce qui était charmant devient grotesque, voire repoussant. Ou encore Lilé, autour d'un secret inavouable et atroce. Le nectar tourne en ridicule ce mari qui se croit peintre et ne se rend pas compte qu'il ne fait que peindre l'attribut féminin dans lequel il passe ses journées en sa qualité de gynécologue. Les gènes parle aussi de la maternité et de l'absence de sentiment maternel que des femmes peuvent éprouver, surtout quand leur progéniture échappe à leur compréhension. La dernière nouvelle attaque cette fois la femme qui se laisse tenter par une aventure. C'est la plus trash mais les moins prudes ne pourront s'empêcher de rire face au comique de situation.
Si on regarde bien, les maris sont la cible mais les femmes ne sont pas des oies blanches non plus. C'est ce traitement équilibré qui rend le recueil si divertissant. Tout le monde en prend pour son grade et de bien des façons, rendant le lecteur tour à tour agacé, triste ou amusé.
Selon les sensibilités, des nouvelles sortiront bien sûr du lot. Elles se valent pourtant toutes. Chacune renferme un microcosme dans lequel on se laisse happer. Rumena Bužarovska maîtrise parfaitement l'art de la nouvelle et ses textes sont drôles, pertinents, acides, un peu fous aussi. Un recueil franchement jubilatoire.
