Dans les années 30, en Californie comme partout ailleurs, la vie est rude pour les travailleurs. George et Lennie parcourent ensemble les ranchs du coin afin d’y trouver un travail, tout en étant nourri et logé.
George est le plus futé du duo, et il veille sur Lennie depuis de longues années. En effet, même si Lennie n’est pas méchant, il a un retard mental et est doté d’une force herculéenne. Cela fait de lui un très bon ouvrier, dur à l’effort, mais parfois son retard intellectuel le rattrape et il « fait des bêtises ».
Les deux hommes partagent le même rêve : celui de vivre de leurs rentes sur un petit lopin de terre qui ne serait qu’à eux.
C’est une nouvelle traduction que nous offre Folio dans ce volume bilingue. D’un côté la version originale, avec toutes ses syllabes abrégées pour coller au mieux à l’oral, et de l’autre la version française qui rend très bien l’atmosphère et les dialogues du récit.
Steinbeck nous montre dans cette histoire les envies, plutôt simples, qui dirigent la classe ouvrière. Avoir un petit chez soi, et ne rien devoir à personne. Mais il nous montre aussi combien ce rêve peut être inaccessible, alors même que l’histoire se déroule aux USA, pays qui met en avant la réussite individuelle. Il ne faut pas oublier que nous sommes juste après le krach boursier de 1929, en pleine Dépression, mais à aucun moment il n’en est fait mention dans le récit. Sans doute que ce krach se trouve à des années-lumière de ces personnages rustres, qui cherchent juste à survivre au jour le jour.
Ce qui frappe aussi dans le récit, c’est le côté inéluctable qui précipite la fin de l’histoire. On comprend très vite que quelque chose va se passer, et que ça ne sera ni en faveur de George, ni en faveur de Lennie. On retrouve un peu de Zola dans la structure de l’histoire, et j’ai ressenti la même chose qu’en lisant l’Assommoir : l’envie que les personnages s’en sortent, tout en sachant que ça sera impossible.
C’est sans doute pour cela que Des souris et des hommes est un classique de la littérature américaine. Au-delà du récit avec ses descriptions presque cliniques des lieux et des personnages, il nous montre que le rêve américain n’est, pour certains, vraiment qu’un rêve inaccessible.