Elle se souvient à peine des avions dont il fallait se cacher, de la survie dans les tunnels sombres, de l'incendie qui a ravagé son île. Après cela, Am (diminutif probable de "Maman") et elle se sont retrouvées seules et se sont installées dans une maison abandonnée. Leur quotidien était constitué de pêche, de culture du potager, des menues tâches nécessaires à une vie sédentaire solitaire. Pour Am, il était important de rester cachées, en sécurité.
Mais après la mort d'Am, l'adolescente a décidé de partir. Sans destination précise, l'important étant seulement d'avancer, de se libérer d'un cadre devenu trop étroit pour elle. Elle a entassé ses affaires dans un chariot et a commencé à pousser celui-ci sur le goudron, cahin-caha. Peut-être rencontrera-t-elle d'autres survivants pour tromper sa solitude ?
Au fil de ses pas, et de ses souvenirs, on découvre le monde tel qu'il est devenu. L'eau est montée, partout. Beaucoup de bâtiments sont immergés. Il n'y a plus d'hommes, plus de gros animaux terrestres. Les poissons abondent par contre, et les oiseaux également.
Ce roman court est donc un récit post-apocalyptique, mais sans difficulté liée à la survie. La voyageuse semble n'avoir aucun souci à se nourrir, pêchant ou ramassant des fruits et légumes dans les jardins abandonnés, voire extrayant des réserves des nombreux édifices humains désertés, où elle peut également s'abriter si nécessaire. Elle ne croise aucun prédateur, aucun danger réel. Le ton est donc doux, contemplatif, au rythme de la marche nonchalante de la vagabonde. Et de l'oiseau qu'elle voit et qui suit la même route qu'elle, qu'elle croise de manière irrégulière mais assez souvent pour y attacher de l'importance.
Comme la jeune fille était petite quand le désastre est arrivé, elle n'en connait pas vraiment les causes, les détails. Elle en constate seulement les effets : mer omniprésente, ponts détruits, énormes trous emplis de mystérieux sacs blancs... et absence totale de vie humaine hormis la sienne. A force de ne pas parler, elle oublie les mots que lui a appris sa mère, en invente d'autres. Quelle importance puisqu'il n'y a plus personne avec qui parler ? Son discours intérieur est souvent très enfantin, car elle manque à la fois de mots et de connaissances de base sur le monde d'avant.
La plume est élégante et poétique. Il n'y a aucun dialogue, même si le personnage principal chantonne quelquefois, ce sont donc des pavés de texte descriptifs, décrivant aussi bien ce qui se passe que les états d'esprit de l'aventurière. Heureusement, les phrases sont courtes et le texte n'est donc pas trop lourd.
Une vision de la fin de l'humanité, mais pas de la fin de la vie.