Les Chroniques de l'Imaginaire

Chevaux de foudre - Wellenstein, Aurélie & Penco Sechi, Beatrice

Les Romains adorent la foudre. Pour défier l'orage et lui prouver qu'ils peuvent dompter ses créatures, chaque fois qu'un Déluge s'abat sur Rome sont organisées des courses de fulgurs qui passionnent les foules. Sept factions s'y affrontent et la compétition est sans pitié. Puisant une puissance supérieure dans l'électricité, les chevaux d'orage atteignent une vitesse inégalable, mais leur férocité les rend extrêmement dangereux : Sans les couronnes qui les contraignent, ils ne demandent qu'à électrocuter les téméraires qui les approchent.

Un soir d'orage, la jeune Thalie assiste à la capture de fulgurs sauvages. Voyant l'affinité qu'elle partage avec ces bêtes farouches, le maîtres des Rouges, le redoutable Caius, décide de l'amener avec elle. En un instant, elle a perdu sa liberté, tout comme Ira le magnifique fulgur noir.

Au sein de l'écurie des Rouges, Thalie découvre un monde violent et brutal. Les fulgurs sont matés par la force brute. D'ailleurs, elle se fait moquer non seulement parce qu'elle est une fille dans un milieu masculin, mais également car elle laisse parler ses sentiments et obtient la coopération d'Ira par l'amour et la douceur, au mépris des usages violents qui prévalent à Rome. Heureusement, il y a son nouvel ami, Marcus, le cavalier prodige, qui lui apporte son soutient pour mettre en oeuvre sa méthode douce.

Cette BD adapte le roman jeunesse éponyme de l'autrice Aurélie Wellenstein publié en 2015 chez Magnard, avec des illustrations signées Beatrice Penco Sechi. Dans le dossier de presse, j'ai découvert sans surprise que toutes deux adoraient les chevaux, cela se ressent pleinement à la lecture. L'histoire de Thalie et Ira, c'est un peu l'histoire de l'équitation pendant les dernières décennies : au fil de ces dernières années, le rapport aux chevaux basé sur la contrainte et la domination a changé, ébranlé par l'équitation collaborative que l'on voit toucher de plus en plus d'amoureux des chevaux désireux de retrouver une relation harmonieuse avec leur partenaire équin. Il reste beaucoup à faire, mais la graine est plantée et c'est une bonne chose. Si la fin douce-amère de la BD peut décevoir les lecteurs qui attendaient une issue plus fleur bleue, elle me semble bien refléter la situation moderne de l'équitation, une partie du chemin restant encore à parcourir avant que le respect devienne la norme plutôt que l'objectif. A noter que l'on découvre parfois les pensées d'Ira, qui fait contrepoint à l'histoire de Thalie et apporte ainsi un peu de cet équilibre qui doit régner entre les hommes et les chevaux.

J'ai trouvé que c'était une excellent idée de nous proposer ces idées dans un contexte qui nous change un peu : l'Antiquité romaine. C'est bien documenté et réaliste, malgré la touche fantastique ajoutée au récit. La dessinatrice donne vie sous nos yeux à des bâtiments emblématiques, tels que le Circus Maximus qui est rendu avec une grand souci du détail. Les dessins sont en effet fins et précis, avec de nombreux détails. D'une manière générale, la BD est très agréable à regarder, avec des personnages beaux et expressifs, des costumes minutieusement dessinés, mais aussi une belle variété de mise en page et de jolies couleurs. Mon seul regret sur les dessins concerne finalement les fulgurs, décrits comme ayant des lignes harmonieuses mais que je trouve plutôt body-buildés d'une manière pas toujours très heureuse.

Au final, ce one-shot est donc un très beau récit, peut-être un poil trop lisse, mais empli aussi bien d'action que de belles valeurs. C'est très réussi aussi bien scénaristiquement que graphiquement, et j'ai pris beaucoup de plaisir à découvrir cette magnifique histoire.