Les Chroniques de l'Imaginaire

La sage-femme d'Auschwitz - Stuart, Anna

1940. Toute jeune mariée, Ester et sa famille sont contraints de laisser leur maison pour se tasser avec d’autres juifs dans le ghetto de Lodz. Alors que les conditions de vie s’amenuisent au fil des ans et qu’elle pense que ça ne peut pas être pire, sa mère tombe gravement malade. 

Malgré ses compétences d’infirmière, Ester n’arrive pas à la soigner et cette dernière ne tarde pas à être sélectionnée par les SS pour être acheminée par train dans le nouveau camp d’Auschwitz. Se refusant à la laisser partir seule, Ester en se rebellant contre les décisions nazies se retrouve à l’accompagner dans un wagon surpeuplé où l’odeur de la peur et de la mort ne la quitteront plus jamais.

À leur arrivée sur le quai, elles retrouvent Ana, une sage-femme polonaise suspectée d’être une résistante qui aidait, avec son mari et ses fils, à la confection et à la circulation de faux-papiers. Alors qu’elles sont persuadées qu’elles ne survivront pas à l’enfer du camp, Ana et Ester ont des compétences médicales qui intéressent les nazis : donner naissance aux enfants des prisonnières.

Une mission terrible car, dès qu’ils ont poussé leur premier cri, les nouveau-nés qui possèdent certains critères pouvant être similaires aux profils aryens sont emmenés et donnés à des familles allemandes dans le cadre d’un nouveau programme absurde nommé « Lebensborn ». 

Dans un ultime acte de résistance, pour pallier la détresse et lutter contre ces actes de cruauté, Ana et Ester se mettent à tatouer secrètement ces nouveau-nés en leur associant discrètement les numéros de déportées de leurs mères. Une lueur d’espoir dans un monde d’une infinie noirceur… et si, après l’horreur de la guerre, grâce à ce petit geste, ces enfants et leurs mères pouvaient se retrouver ?

Une histoire inspirée de faits réels particulièrement glaçants mais soigneusement documentés par Anna Stuart qui met ici en lumière la vie de Stanislawa Leszczynska, connue pour avoir tenu tête au Dr Josef Mengele, « l’ange de la mort » tristement célèbre pour ses expériences cruelles.

Les conditions de (sur)vie dans les baraquements d’Auschwitz, les actes répétés de déshumanisation, le manque d’hygiène dans les hôpitaux, les leurres mensongers employés lors des sélections pour les « douches collectives », les marches de la mort avant la libération des camps… l’autrice ne laisse rien au hasard.

Quelque chose m’a pourtant dérangée au niveau de certaines innombrables répétitions sentimentales qui à la longue me sont apparues de l’ordre d’un mauvais verbiage venu meubler les pages. Des bondieuseries mignonnettes qui, si elles peuvent être là pour apaiser les cœurs, m’ont davantage choquée tant elles contrastent avec les scènes terribles aux détails morbides.

Du coup, on aurait presque l’impression que l’histoire d’amour relègue au second plan les atrocités pourtant, elles, bien réelles. Je n’ai rien contre la volonté d’instiller de la bonté et du courage pour illustrer la gentillesse gratuite qui demeure malgré la bâche de haine étouffante des nazis. Mais le style d’écriture n’a pas réussi à me convaincre de qualifier ce livre de grand roman historique. 

En revanche, il aura eu le mérite de me donner envie de tout savoir sur les Lebensborn (je vous conseille d’ailleurs fortement la bande dessinée récemment parue d’Isabelle Maroger) et de franchir le cap de la lecture d’autres ouvrages comme celui de Primo Levi avec Si c’est un homme.