Les Chroniques de l'Imaginaire

Que reviennent ceux qui sont loin - Adrian, Pierre

Le narrateur revient passer ses vacances en Bretagne, dans la maison familiale en bord de mer qui accueille depuis des années les oncles, tantes, cousins et cousines, pièces rapportées et petits-enfants. Toute l'année, la maison s'endort en attendant que les membres de la famille viennent la sortir de son sommeil aux prémices de l'été. La vie reprend alors ses droits et les journées s'écoulent au rythme des allées et venues de ceux qui arrivent puis de ceux qui repartent. Le lave-linge et le lave-vaisselle s'en donnent à cœur joie, les placards débordent et les repas se font dans la bonne humeur et la multitude.

A trente ans, le narrateur regarde avec tendresse tous ces gens qu'il connaît depuis toujours et qu'il a un temps abandonnés en passant ses vacances d'été ailleurs. Il a grandi, a eu envie d'autre chose, et choisit à présent de retourner auprès des siens. C'est alors un sentiment mélangé de plaisir et de nostalgie qui l'envahit, lui qui est heureux de retrouver le cocon sécurisant de sa famille mais qui se rend bien compte, alors que sa grand-mère atteint l'âge où on ne sait pas si elle sera encore là le prochain été, qu'une page va peut-être se tourner. La maison restera-t-elle le refuge de leurs étés, ou est-ce que les liens vont se distendre jusqu'à ce que la maison soit ventilée dans un acte notarié ?

Ce récit est celui d'un homme qui bascule d'une période à une autre. Il glisse de l'enfance vers l'âge adulte, en remarquant toutes ces petites choses qui lui semblaient auparavant insignifiantes et qui se révèlent les marqueurs de ses étés de jeunesse. La vieille nappe en toile cirée, les grains de sable dans les draps, la soirée du quinze août qui marque la fin des vacances...

C'est doux et juste, on retrouve aisément les repères des familles qui se retrouvent pour les vacances d'été avant de se quitter pour une année. Même lieu, même moment, mêmes souvenirs. La force du récit est ce sentiment d'universalité qu'il éveille, car chacun peut s'y retrouver. C'est aussi sa faiblesse, car l'histoire manque de singularité et de faits marquants qui lui donneraient une saveur particulière. Toutefois, l'écriture tendre et fluide de Pierre Adrian ajoute du charme à cette atmosphère mélancolique qui à elle seule vaut la lecture.