Mimi Augello était en la galante compagnie d'une femme mariée, quand l'arrivée très inattendue du mari l'a poussé, dans la meilleure tradition du vaudeville, à se sauver par le balcon. Espérant profiter de ce que les persiennes et la fenêtre de l'étage inférieur étaient ouvertes pour partir discrètement, Augello a la mauvaise surprise de mettre la main sur un corps glacé allongé sur le lit. D'où son arrivée en catastrophe chez Montalbano.
Rien à faire en pleine nuit, mais le lendemain matin, le signalement d'un mort trouvé tout habillé allongé sur un lit n'est pas à la bonne adresse, cependant que le cadavre découvert par Augello a disparu. Le mort qu'ils trouvent est Carmelo Catalanotti, un metteur en scène amateur aux méthodes originales, usurier à ses heures. L'enquête est compliquée par le fait que l'un des débiteurs de Catalanotti s'est fait tirer dessus, et refuse de dénoncer son agresseur.
L'intrigue policière, comme souvent dans les romans mettant en scène le commissaire Montalbano, est un prétexte pour présenter l'état de la Sicile de nos jours, celle que les visiteurs voient et celle qu'ils ne voient pas, avec la beauté de ses sites historiques et l'effrayante proportion de personnes au chômage, ici représentées par le jeune couple Nico-Margherita. Elle sert aussi de cadre à l'évolution du personnage principal, entre ce qui ne change pas : son caractère, ses habitudes alimentaires, les hommes qui l'entourent (à commencer par l'ineffable Catarella !) ou la façon dont il accomplit son devoir de policier ; et ce qui change : son corps, avec l'âge qui vient, et ses relations avec son éternelle et lointaine fiancée, Livia. Ces dernières vont prendre un tournant possiblement décisif, avec l'apparition dans ce roman de la jeune et belle Antonia, cheffe de la Police Scientifique locale, qui va aider le commissaire dans son enquête, en plus de le foudroyer d'amour.
Le traducteur expose dans une préface passionnante comment il en est venu à traduire la langue si particulière de Camilleri, dont les différents niveaux étaient une gageure à faire passer dans une autre langue. Pour ceux et celles qui n'auraient jamais lu de roman dans la série, la préface sera sans doute très utile, sachant que le texte, avec les choix du traducteur, est suffisamment clair pour être compréhensible, même pour qui ne serait pas familier du "camillerese" traduit par Quadruppani. Pour les habitué.es de l'auteur et de son personnage, pas de surprise, mais de grands moments de drôlerie dans un univers qui a beaucoup de points communs avec la commedia dell'arte.