Dans un petit hameau du Cantal, alors qu'on fête le 14 juillet en cette année 1977, trois inconnus viennent se joindre aux festivités. Deux Allemandes et un Français, avec leur van et leur look hippie. Le Français ne restera pas longtemps mais Mariella et Brunhilde vont s'installer. Et ne plus jamais partir.
La narratrice n'a pas connu l'arrivée des Allemandes dans le village de sa famille. Mais elle sait que les deux femmes étaient amies avec son grand-père et que Lili, sa mère, a eu l'occasion de les rencontrer. Intriguée par le mystère qui entoure les raisons de leur venue dans ce hameau perdu du Massif Central, elle se rend sur place avec Lili pour poser des questions, essayer de comprendre.
Le récit opère donc des va-et-vient entre le présent et le passé, un passé qui ne s'arrête pas à 1977 et aux années suivantes mais remonte encore plus loin, du temps de la guerre, lorsque Antoine Carette était prisonnier de guerre en Allemagne. Dans la ville de naissance de Brunhilde. Inéluctablement, un lien les lie. Fruit du hasard ou quête exaucée ? Nul ne le sait.
Ce qu'on sait en revanche, c'est que l'arrivée de ces deux jeunes femmes céramistes aux seins libres sous leurs robes amples a réveillé le hameau. Les bonnes âmes les ont accueillies avec sympathie, les mauvaises langues ont craché leur venin. Qui sont-elles ? Que cherchent-elles ? Alors que Jean, Antoine, Gisèle et Boris les aident à s'installer et à trouver leur place, d'autres ne souhaitent que les voir déguerpir. C'est qu'elles dénotent dans le paysage, ces deux femmes, surtout Brunhilde, la plus belle, la plus taiseuse, mystérieuse, l'air malcommode. Et des Allemandes en 1977, alors que la guerre est encore présente dans les têtes, ce n'est pas bien vu. De plus des rumeurs courent : elles seraient des espionnes...
En se basant sur ses propres histoires de famille et celles de son hameau dans le Cantal, Pauline Clavière tisse un récit de femmes poussées par le désir de suivre leur propre chemin, de se réinventer ailleurs sans oublier qui elles sont. Elles témoignent d'un attachement viscéral à une terre, à des gens, à une atmosphère qui les a happées et les a conduites à rester en dépit des obstacles que d'aucuns ont voulu dresser sur leur route. C'est aussi un beau plaidoyer pour les paysans des montagnes, gens de peu qui ont le cœur sur la main et l'esprit plus ouvert qu'on ne le croit. Ces personnages, représentés magnifiquement par Antoine et Jean, sont l'atout principal de ce roman.
Le mystère autour des raisons de l'arrivée de Mariella et Brunhilde reste le fil rouge de ce récit, dont on regrettera la narration trop décousue parfois. On passe souvent d'une époque à une autre, d'un point de vue à un autre, voire à deux autres. Tant et si bien qu'on peine à s'installer dans le récit et que cela nuit à la fluidité de la lecture. Mais le secret potentiel et les caractères des protagonistes de 1977 nous tiennent en haleine jusqu'au bout. Est-ce que le dénouement nous donnera le fin mot de l'histoire ? Je ne dévoilerai rien si ce n'est que je n'ai pas été déçue. A votre tour de le découvrir !