Treize ans plus tôt, Wei Wuxian, cultivateur ayant embrassé une voie hérétique, a été vaincu par tous les clans unis après avoir fait des milliers de victimes. Sa dépouille a été scellée sous une montagne et son âme a disparu, aussi est-il impossible qu'il puisse se réincarner et prendre possession d'un corps mortel pour reprendre ses méfaits.
Du moins en théorie. Mo Xuanyu, bâtard rejeté par le clan de son père et méprisé par la famille de sa mère, réussit à invoquer le fantôme maléfique en se sacrifiant pour cela. Wei Wuxian est donc de retour, mais cela s'assortit d'une contrepartie : pour que la malédiction ne se retourne pas contre lui, il doit assouvir la vengeance désirée par celui qui lui a offert son corps. Il n'a pas très envie d'anéantir la famille Mo, mais ne souhaite pas non plus mourir de faim ou de violence suite aux mauvais traitements qui lui sont infligés. La situation s'emballe avec l'arrivée de jeunes cultivateurs du clan Lan venus aider à lutter contre des cadavres ambulants qui sévissent à proximité.
Le Grand Maître de la Cultivation Démoniaque est la deuxième œuvre de Mo Xiang Tong Xiu, autrice chinoise de danmei (genre littéraire chinois présentant des relations amoureuses entre personnages masculins) extrêmement populaire. Il s'agit ici de l'adaptation en manhua à partir du webnovel original. Ce premier tome couvre les événements jusqu'aux chapitres 8 ou 9 de la parution en ligne originelle (qui comprend au total 113 chapitres principaux et 13 chapitres bonus).
J'ai beaucoup aimé ce manhua qui combine une histoire bien ficelée avec pas mal d'action et de rebondissements, du mystère et de l'humour, le tout avec une tension permanente. Pour la romance, il va falloir attendre encore un peu, les deux protagonistes principaux n'ayant ici eu que l'occasion de se croiser brièvement. Mais on n'a pas le temps de s'ennuyer et le tout se dévore rapidement.
Pour autant, le manhua souffre de quelques défauts. Le plus évident est la complexité à suivre le récit. L'histoire originelle, déjà compliquée et comprenant de nombreux passages purement explicatifs, a été un peu réagencée et simplifiée, et dans l'ensemble les explications se retrouvent bien intégrées dans un scénario très fluide. Pourtant, certains passages ont été simplifiés à outrance et en deviennent peu clairs, voire modifiés de manière peu cohérente. J'ai fini par lire la version roman avant de relire la version manhua, ce qui m'a éclairée sur de nombreux points, et je constate que certains épisodes du manhua sont incompréhensibles sans les explications du roman, ce qui est vraiment dommage.
Autre problème, les nombreux personnages sont parfois difficiles à reconnaître. Les personnages principaux sont dessinés avec application, mais les personnages secondaires sont plus vite expédiés. J'avoue avoir bien du mal par exemple avec le groupe de cultivateurs junior du clan Lan, tous habillés de blanc, malgré leurs coiffures légèrement différentes.
D'ailleurs, un autre aspect qui pourra perturber les lecteurs français, c'est la surabondance de noms pour chacun des personnages : ils ont tous des noms de naissance, mais usent plutôt de noms de courtoisie, voire de surnoms, ce qui fait donc trois noms par individu. Le manhua essaie de simplifier, notamment en n'utilisant pas toute la déclinaison de diminutifs ou titres honorifiques chinois présents dans le roman, mais cela reste dur pour un lecteur peu habitué.
Si les deux pages d'introduction présentant quatre des protagonistes principaux sont bienvenues, il est cependant regrettable qu'elles contiennent des erreurs aussi grossières que la confusion entre "oncle" et "neveu", apportant un zeste de confusion dès le début de la lecture !
Les dessins sont dans l'ensemble plaisants, mais loin d'être toujours aussi travaillés que la splendide illustration de couverture, à mon grand dépit. Il faut dire que j'adore admirer ces beaux cultivateurs aux longs cheveux et robes raffinées, et quand les dessins sont plus grossiers je suis un peu déçue. Il y a également pas mal de passages assez gore un peu dégoûtants, mais c'est l'histoire qui veut ça. Je regrette par contre l'usage de couleurs quasi uniformément gris/brun, donnant une ambiance très sombre même quand la situation ne le justifie pas. Petit coup de cœur pour l'âne, toujours très amusant (il fait partie des éléments comiques de l'histoire) avec ses mimiques expressives (mais pourquoi n'est-il pas tacheté comme indiqué dans le roman ?).
Bref, ce n'est pas un coup de cœur (alors que la version roman l'est), mais je me suis quand même régalée. Ce premier tome finit en cliffhanger au milieu d'un passage explosif, mais heureusement le deuxième tome est déjà disponible. J'espère que l'adaptation de la suite du récit le deviendra également sans tarder !