Le juge-maje Ochozias a entraîné sa bande de fidèles d'une (més)aventure à la suivante, toujours en leur promettant que cette fois ils seront enfin payés. Pour l'instant, ils sont supposés aller à Sonora apporter des médicaments. Mais en route ils font la connaissance de la soeur Evangeline, une religieuse de la Croix Blanche qui demande à acheter une partie des médicaments, et d'un mystérieux prisonnier. Ce dernier, Eliakim, semble fasciner Ochozias, au grand dam de Denna, sa lieutenante, à tel point que le juge-maje le suivra jusqu'à l'ancienne Xemballa, perdue depuis longtemps.
A Carthagène, en 1923, tout le monde sait que les jours du Nouveau-Coronado sont comptés. En fait, la colonie doit être vendue aux enchères, et les représentants des acheteurs commencent d'arriver. Tout doit bien se passer, et c'est pourquoi les miliciens du vice-roi, Folarin Delmar, sont encore plus brutalement odieux que d'habitude. Ferran, lui, est dans la police, et il est chargé d'enquêter sur un meurtre particulièrement affreux survenu dans la bonne société. Apparemment, la momie d'une fée serait impliquée. Ferran est partagé : d'un côté, il ne croit plus à rien depuis longtemps. D'un autre côté, ses racines indigènes lui interdisent d'ignorer totalement la possibilité de l'existence de cette momie.
L'atmosphère de fin de règne, de déliquescence, est très bien rendue dans ce roman, et ceux et celles ayant lu les romans précédents dans le même univers le reconnaîtront, tout en mesurant les notables différences. La Lune d'or n'est plus qu'une "terre gaste", où plus rien ne pousse, et où plus rien n'a de valeur, surtout pas la vie humaine. C'est peu de dire que l'ambiance est sombre. En fait, au fur et à mesure qu'on avance dans l'histoire, l'horreur empire, ce qui est magistralement mis en scène dans la troisième partie, avec l'évolution du personnage de Vittorio.
De ce point de vue, c'est vraiment très bien réussi. Peut-être un peu trop pour moi, qui ai ressenti un sentiment d'excès d'horreur et de violence déjà dans la deuxième partie, avec les scènes de massacre pendant le carnaval à Carthagène. Par ailleurs, je ne suis pas arrivée à m'attacher aux personnages, dont les motivations me sont restées opaques, comme leurs multiples virevoltes, qui m'ont paru artificielles.
En somme, un roman puissant d'un auteur à suivre, mais peut-être à réserver à des lecteurs et lectrices au coeur mieux accroché que le mien.