Paru entre 1981 et 1984, Shinkirari — qu’on peut traduire par « éclair de lumière» — est un one shot de « slice of life », c’est-à-dire « tranches de vie » en français. On y découvre le quotidien d’une jeune femme mère de deux enfants au Japon au début des années 1980. Elle se consacre à sa vie de femme au foyer tandis que son mari travaille et n’est que fort peu à la maison.
A travers des scènes quotidienne, on découvre ses envies et ses aspirations. Cantonnée à son rôle de mère et de ménagère, elle aspire à autre chose pour anticiper le jour où ses filles quitteront la maison. Très vite, on se rend compte que son mari ne s’occupe que très peu de ses enfants, et qu’il aime se faire servir par sa femme, sans jamais se rendre compte de tout ce qu’elle fait au sein du foyer. La jeune femme est bien consciente qu’elle sait tout de son mari — du moins le croit-elle — mais se demande si la réciproque est vraie.
Scène après scène, on suit donc le chemin vers l’émancipation que tente de prendre l’héroïne.
Dans ce manga, on plonge dans les relations entre cette femme et son mari, mais aussi ses relations avec ses filles, et surtout sa relation avec elle-même. Au fil de ses interrogations, ses déceptions et ses joies, peu à peu se révèle une jeune femme moins soumise qu’il n’y parait et capable de se rebeller quand il le faut.
Cette histoire est basée en grande partie sur le premier mariage de l’autrice, mariage qui n’a pas été heureux du fait de l’alcoolisme et de la violence de son mari, révélées après les noces. Mais il n’y pas de réelle amertume dans ce récit, et il existe un vrai détachement entre l’origine et le manga, ce qui explique sans doute le côté parfois mélancolique des scènes. La jeune femme se posant souvent la question de ce qui pourrait changer dans sa vie, mais sans vouloir perdre tout ce qu’elle possède déjà.
Avec son dessin stylisé et l’absence de trame, Murasaki Yamada fait partie de ces artistes de la nouvelle vague du manga, féministe avant l’heure, qui avec ses traits fins arrive à camper des personnages et des attitudes très réalistes.
En fin de volume, on retrouve un très long article expliquant la genèse des travaux de Murasaki Yamada, mais aussi sa biographie et quelques photos. J’ai trouvé cet article très intéressant, car il remet très bien dans le contexte historique et éditorial de l’époque les créations de la mangaka et la place qu’elle a su se faire dans le paysage éditorial.
J’ai beaucoup aimé découvrir cette mangaka et son histoire à travers ce volume. Même si la société japonaise à évolué, c’est un bon rappel de ce que pouvait être le quotidien des femmes au début des années 80 au Japon.