Enfants, les frères Winters rêvaient du Nouveau Monde : de l'aventure, des pépites d'or grosses comme le poing, des animaux fantastiques dont les organes greffés gratifient leurs porteurs de pouvoirs magiques spectaculaires. L'aîné, Jarod, est parti suivre son rêve. Le cadet, Abraham, est resté dans l'Ancien Monde soutenir leur mère.
Trois années ont passé. Abraham essuie deux mauvaises nouvelles d'affilée : la mort de sa mère, ainsi que l'annonce inquiétante de la mort quasi certaine de son frère aux mains de la Harpiste. Cette créature cruelle à tête de harpe domine le territoire sauvage de Symphonie : elle asservit par la musique les intrus qui s'y risquent, les contraignant à participer à des spectacles aussi grotesques que sanglants. Une fois englués dans ses rets, ils n'ont aucune chance d'en réchapper.
N'ayant plus rien pour le retenir, le jeune homme d'une vingtaine d'années s'embarque pour Nacarat, de l'autre côté de l'océan. Là-bas à l'Ouest, dans les terres rouges hantées par la Harpiste, il espère retrouver son frère disparu. A Frontières, la dernière ville sûre avant de rentrer dans Symphonie, Abraham fait la connaissance de chasseurs de primes qui ont tous un motif de vouloir éliminer la Harpiste. Reste à les convaincre de les laisser se joindre à eux...
La Harpiste des terres rouges est un mix de western et de fantastique. On y trouve l'opposition entre Ancien et Nouveau Monde, des pionniers qui partent dans l'Ouest en quête de fortune ou d'aventure. Pour affronter ces déserts brûlants de terre rouge où l'Homme n'est pas le bienvenu, les colons disposent de leurs mustangs et de leurs armes à feu, mais pas seulement : pas question de braver les dangers de ces régions inhospitalières sans greffe.
Ces territoires vierges sont en effet peuplés de créatures surnaturelles. Se faire greffer un morceau d'entre eux, c'est hériter à coup sûr d'un pouvoir en rapport. Le processus est aléatoire, on ne sait jamais sur quel pouvoir on va tomber, utile ou non ; certains sont spectaculaires. Malheureusement, tous ont un "revers" : chaque nuit, le pouvoir se retourne contre son porteur qui doit s'en protéger comme il peut.
Après un prologue cauchemardesque, le début du roman est plutôt lent. On fait connaissance avec les personnages, leurs pouvoirs et leurs histoires, tout en cheminant dans un désert où la menace est omniprésente et les escarmouches fréquentes. L'horreur n'est jamais loin et la tension monte peu à peu au fur et à mesure que le groupe de chasseurs se rapproche de la Harpiste. Le récit devient alors plus violent, plus onirique, plus étrange. Âmes sensibles s'abstenir.
C'est un récit dur, horrifique, qui ne laisse personne indemne, surtout pas ses protagonistes. Mais également une histoire prenante et poignante, dans laquelle on se laisse emporter grâce à la plume riche et évocatrice d'Aurélie Wellenstein.
