C’est la Saint-Valentin sur l’île de Terre-Neuve, dans le Nord-Est du Canada. Les blizzards sont le quotidien de ces insulaires habitués à se retrouver coupés du monde. Pourtant la tempête qui les menace en ce jour, d’une force et d’une violence rares, promet d’être tout sauf traditionnelle ou romantique.
En parallèle, à l’intérieur du restaurant Hazel, c’est un déchaînement d’une autre nature qui se prépare. Iris, jeune serveuse et personnage emblématique de l’histoire, redoute de croiser le regard de John, son chef à l’emprise malsaine avec qui elle entretient une liaison.
Son collègue Damian, qui a pris le parti de n’avoir plus aucun principe, cache sa nuit de défonce comme il peut tandis qu’Olive, jeune autochtone déracinée et sans famille, qui n’a jamais eu la peau assez foncée pour être acceptée parmi les filles à la peau foncée et jamais assez blanche pour les filles blanches, cherche un peu de chaleur et de réconfort.
Il y a aussi George, l’épouse de John, dont la réussite sociale apparente ne cache que vanité et superficialité. Une bien creuse et triste ambition. Et puis il y a aussi Calv, Roger, Donna, Amanda, David… une multitude de personnages aux trajectoires chaotiques, chacun vivant dans l’excès et la destruction. Tous sont sur le fil, prêts à exploser. Entre deux coupures de courant, la vérité pourrait bien faire enfin surface et tout emporter sur son passage.
14 février, journée officielle pour célébrer l’Amour. Sauf que dans ce livre, il est tout sauf question d’amour et d’affection. Bien au contraire. C’est trash, violent, pernicieux, toxique et foutrement rude, cynique et acerbe.
« Ça pourrait faire un peu mal. Soyez courageux. » On ne pourra pas dire qu’on n’était pas prévenu d’entrée de jeu avec cette citation qui ouvre le bal de l’histoire !
Entre la couverture un peu champêtre et le résumé assez théâtral, faut dire qu’il y avait de quoi s’imaginer un cadre certes sauvage, dans une contrée lointaine, mais j’étais clairement pas prête pour un microcosme au vitriol aussi mordant que désabusé.
Alcool, sexe, références pop culture et locales (très heureuse de retrouver les timbits, petits beignets sucrés de chez Tim Hortons). De la défonce sous tous les angles, de toutes les sortes et par tous les pores de la peau. Mais si encore il n’était question que de ça… Non, c’est pire encore car il y a la façon de le dire puis tout ce qui est sous-jacent, que l’autrice ne dit pas forcément mais qu’on devine.
Peu de respiration, les phrases (parfois courtes, parfois trop longues) s’enchainent et la multitude de personnages aussi. Difficile de toujours percevoir les degrés de relations entre eux et ces liens qu’il faut raccrocher comme des wagons.
C’est assez anxiogène. Ça parle de masculinité toxique, de traumatismes de longue date, ceux qui concernent toutes les classes sociales confondues. Il y a des coups, des humiliations, des abandons, du harcèlement, de la manipulation, des mensonges, des sacrées dérives, et ça laisse des marques.
Il faut faire des pauses, parfois sauter des passages, parfois revenir en arrière parce que le style est un peu haché et confus. Mais finalement à l’image de la complexité des relations humaines qui peuvent partir dans tous les sens. Même si celles-ci ici sont plus brutales que ce à quoi je m’attendais en ouvrant ce livre de 544 pages.