Amazing Ameziane s'attaque dans cet ouvrage à retracer la vie de Sergio Leone mais surtout l'impact qu'il a eu sur le western et la déflagration ayant suivi sa première vision du genre dans Pour une poignée de dollars. Sergio Leone avec ce film a révolutionné les codes du western, le ramenant à la vie, lui qui devenait moribond avec les films où jouait John Wayne. Ces vieux westerns où les cowboys étaient toujours très propres, les vêtements repassés, les couleur chatoyantes et où les méchants affrontaient des gentils sans défaut, bien lisses.
Chez Leone, les méchants ne sont pas forcément que méchants et les gentils ne le sont pas vraiment ou du moins pas tout le temps. Dans sa vision de l'Ouest et dans ses films, la poussière est omniprésente, salissant les habits, les bêtes, les décors mais aussi les esprits. Le héros a ses faiblesses et rien n'est tout blanc ou tout noir.
Sergio Leone ne s'est pas contenté de changer la vision des cowboys, il a changé les codes du western, le révolutionnant et lui donnant une seconde vie. Ses plans, les gros plans sur les yeux des personnages, ses travellings audacieux ont donné du souffle à son cinéma. Qui, à cette époque, a osé ouvrir son film avec une scène de plus de dix minutes sans un dialogue avec juste le bruit de fond d'une éolienne rouillée et d'une mouche qui agace un personnage ? Lui seul a eu cette audace, ce genre de scène ayant été repris depuis par de nombreux réalisateurs.
Mais ce qui caractérise aussi le cinéma de Leone, c'est l'importance de la musique, cette omniprésence des mélodies d'Ennio Morricone qui ne sont pas une musique de fond mais qui appartiennent à la scène, lui apportent de la vie et nous emportent. Amazing Ameziane nous explique que Morricone composait les morceaux avant le film et que Leone les diffusait pendant que les acteurs tournaient les scènes. Tout l'inverse de ce qui se fait généralement. Le réalisateur et Morricone ont développé une complicité jamais égalée dans le monde du cinéma qui fait que l'on associe encore une musique à une scène cinquante ans après. J'espère qu'un jour Amazing Ameziane s'attaquera à la vie du génial Ennio Morricone.
L'auteur nous montre aussi que Leone cherchait des acteurs peu connus au départ mais avec des gueules, une démarche, une allure. C'est lui qui a révélé Clint Eastwood, lui qui a donné un second souffle à la carrière de Lee Van Cleef, lui qui est allé cherché Eli Wallach pour en faire un personnage légendaire et un méchant inoubliable. C'est aussi lui qui a donné pour la première fois à Henry Fonda un rôle de salaud et qui a utilisé son regard autrement que pour séduire les femmes.
Lorsque l'on sait que Quentin Tarantino est un fan absolu du réalisateur, on comprend mieux le choix de ses acteurs, l'importance qu'il attache à la bande-son de chacun de ses films et surtout sa façon de filmer.
La construction de ce roman graphique, la façon d'Amazing Ameziane de penser ce livre collent parfaitement à l'état d'esprit de Sergio Leone, à sa façon de voir les choses. C'est spectaculaire tout en s'attachant aux détails. Les graphismes et les couleurs employées sont superbes, cette alternance entre le noir et blanc et la couleur permettent de bien distinguer les scènes en mettant en valeur certaines d'entre elles. Coup de cœur particulier à la couverture qui est tout simplement splendide.
J'ai aimé les textes retranscrivant les pensées du réalisateur à côté des dessins sans case, cette liberté de construction des planches.
On ressent dans cet ouvrage toute la passion de l'auteur pour Sergio Leone, qui a marqué son enfance et celle de beaucoup d'autres. C'est une mine d'informations sur le réalisateur et sur le cinéma qui vous amèneront à vouloir visionner les films d'autres cinéastes. Ce livre est le premier d'une nouvelle Ciné Trilogy que l'auteur va sortir dans les années à venir et que j'attends avec empressement.
Pour conclure, je vais reprendre la quatrième de couverture qui est un clin d’œil à une scène mémorable de l'un de ses films : "Le monde se divise en deux, mon ami : Ceux qui aiment Sergio Leone et ceux qui ne connaissent rien au cinéma."