Les Chroniques de l'Imaginaire

À nos vies imparfaites - Ovaldé, Véronique

Habituée aux romans, dont le magnifique Ce que je sais de Vera Candida (Prix Renaudot des lycéens 2009), Véronique Ovaldé se risque au recueil de nouvelles et donne vie à huit histoires intrinsèquement liées par la constellation de personnages qui les composent.

Le premier à entrer en scène est Auguste Palanquin, vingt-huit ans, dit Auguste Baraka en raison de sa légendaire malchance et d’une extrême maladresse qui semblent le poursuivre au quotidien. Qu’ils s’agissent de simples rencontres qui virent en malentendus, d’une usurpation d’identité lors d’un concours professionnel ou du choix d’un appartement un jour de grève dans les lignes de métro, Auguste navigue de petite déveine en petite déveine sans pour autant se défaire de son sourire, ni perdre sa patience.

Un charme qui pourrait bien séduire Éva, agente immobilière peu efficace dans un travail qui ne lui convient pas et mère célibataire plutôt anxieuse concernant l’avenir de sa fille Marguerite, adolescente auto-renommée Bob, en pleine crise introspective. Toutes deux vont, sans le savoir, jouer un grand rôle auprès de Rachel, leur voisine, lorsque celle-ci se retrouve à devoir gérer, un jour de funérailles, un mystérieux visiteur, inopiné et surtout menaçant…

Difficile de résumer cette lecture sans risquer de trop en dévoiler en présentant la liste des protagonistes au cœur de ces tranches de vies. Disons que ce sont des histoires courtes, aux univers différents. On y rencontre des situations plus légères que d’autres, avec en toile de fond un goût prononcé de l’autrice pour relier les personnages entre eux. Simple évocation ou lien direct, c’est plutôt plaisant de voir les prétextes trouvés pour la connexion et les rôles qu’ils endossent.

Des existences parfois compliquées et malmenées comme pour nous rappeler que la vie est loin d’être un long fleuve tranquille (rien ici ne semble linéaire). Et pour éviter de tomber dans un cercle vicieux saturé de pathos, Véronique Ovaldé a le sens de l’humour, en plus d’avoir une imagination onirique et de manier une plume délicieusement corrosive par moments.

Ces personnages parfois loufoques nous demeurent pourtant accessibles et ressemblent presque à une tierce connaissance. On ne rit pas non plus à toutes les pages, même si les fréquentes apostrophes au lectorat touchent leur cible en plein cœur et certains retournements de situation sont mieux réussis que d’autres (ceux vers la fin s’essoufflent un peu). 

Cela n’en demeure pas moins une jolie découverte, à la fois décalée et inattendue (un peu comme ce superbe dodo en couverture qui a néanmoins une explication bien particulière), et j'ai passé un bon moment de lecture, sans pour autant réussir à expliquer l’obtention du Prix Goncourt de la Nouvelle 2024