L'Impératrice Valentina n'a pas pu échapper à l'assassinat commandité par la concubine préférée de son époux l'Empereur. Celui-ci a fermé les yeux, désirant mettre fin à la puissance de la famille De Florès tout en écartant du trône son fils aîné au profit de celui qui n'est pas encore né mais dont les prophéties annoncent la grandeur. Mais Valentina a réussi à sauver ses jeunes enfants, les jumeaux Alric et Adélaïde. Confiés à une servante de confiance, les deux orphelins ont changé d'identité et vivent désormais dans une ferme d'un village reculé dans le Nord.
Adélaïde de Florès a désormais vingt ans et est déterminée à protéger les siens. Le temps est venu pour elle de s'en aller, elle le sait. Elle profite donc du passage de mercenaires, les Loups Noirs, pour intégrer leur petite troupe, déguisée en garçon. En leur compagnie, elle va rejoindre la garde de la grande-duchesse Thyra Vintergard, qui comme chaque hiver doit repousser les attaques des barbares d'Eiskaarn.
Cet hiver, la menace semble plus grande que d'habitude. Les Eiskaarniens sont plus agressifs, l'Empereur ignore les demandes d'assistance, quelque chose couve. Quelque chose qui dépasse de loin ce que pouvaient imaginer Adélaïde, peu au fait de la dynamique des forces de l'empire du fait de sa vie isolée, ou même Thyra, pourtant habituée aux basses manœuvres politiques !
Ce roman est clairement l'introduction d'une œuvre qui va se développer plus que cela. L'univers nous est présenté, avec ses jeux de pouvoir malsains à base de trahisons et autres forfaitures, mais également son système mythologique/magique avec des esprits qui s'incarnent sous forme d'oiseaux et de mystérieux dons familiaux. Les pièces sont posées et commencent à se déplacer, mais pour le moment on est loin de voir comment va se dérouler la partie car on ne peut guère relier entre eux les nombreux éléments qui nous sont fournis.
La romance promise n'avance guère non plus, on est dans du slowburn, nos héroïnes ont fait connaissance et appris peu à peu à se faire confiance, mais pas au point de s'ouvrir entièrement l'une à l'autre. Adélaïde redoute la réaction de Thyra si elle apprenait son identité réelle et préfère lui cacher, d'autant qu'elle se sent bien inférieure à cette grande-duchesse forte et assurée ; Thyra sait qu'Adelaïde lui cache quelque chose, mais préfère respecter son choix de discrétion. Leurs sentiments naissants sont pour le moment balbutiants.
J'ai particulièrement aimé le décor particulièrement glacial : habituellement, quand un roman de fantasy se passe dans une région froide, les personnages ont les doigts gelés, sans plus ; ici, on va bien plus loin car les terres par-delà les montagnes du Nord de l'Empire rappellent la Laponie : les autochtones vivent au milieu des rennes et des ours polaires, habitent des iglus et profitent du spectacle magnifique d'aurores boréales. C'est dépaysant et très sympa.
J'ai aussi beaucoup apprécié les oiseaux liés à certaines personnes, et notamment le fait qu'il ne s'agisse pas forcément de variétés majestueuses. Il y a un glossaire ornithologique en fin d'ouvrage, n'hésitez pas à le consulter en cours de route, moi je regrette de ne l'avoir découvert qu'à la fin.
Parmi ce que j'ai moins apprécié, il y a le rythme un peu lent, j'ai parfois trouvé le récit longuet. Et la fin frustrante en cliffhanger : même si en vrai l'héroïne est tombée de la falaise quelques paragraphes plus tôt, elle reste dans une situation critique... Pas très sympa quand on ne sait pas quand va paraître le tome suivant et combien de tomes la série va compter !
Je m'interroge également sur les efforts faits pour dissimuler que les jeunes De Florès ont survécu : certes, ils sont supposés morts et ont changé de couleur de cheveux, mais conserver leur prénom me semble pour le moins peu avisé. Il ne doit pas y avoir tant que ça de jumeaux de cet âge avec ces prénoms...
Cela reste cependant une chouette lecture, avec - cerise sur la gâteau - une couverture vraiment magnifique.