Les Chroniques de l'Imaginaire

À lire à ton réveil - Bennett, Robert Jackson

Quelques années après la fin de la Seconde Guerre mondiale, James, jeune historien anglais au passé sulfureux, s'installe dans une maison délabrée perdue au fin fond de la campagne française. Outre son désir de mettre quelque distance entre ses créanciers et lui, il compte procéder à des fouilles archéologiques dans les ruines de l'abbaye toute proche. Il est persuadé qu'elle recèle des secrets qui, une fois publiés, lui permettraient de remettre sa carrière académique sur de meilleurs rails. C'est du moins ce qu'il explique dans ses lettres à Laurence, son bien-aimé, qui doit le rejoindre dès que sa santé le lui permettra. D'ici là, James creuse, James explore… et James découvre des choses qu'il n'aurait jamais cru possibles.

Après les trilogies des Maîtres enlumineurs et des Cités divines, aussi énormes en termes de quantité que de qualité, j'étais curieux de voir comment Robert Jackson Bennett s'en tirerait sur un format court. Force est de constater qu'il s'en tire fort bien. Le format épistolaire pour lequel il opte lui permet de doser savamment l'avancement de l'intrigue et les révélations qu'il nous fait, ce qui ne contribue pas peu à la tension toujours croissante que l'on ressent à la lecture des lettres de James. On se demande avec lui si les expériences qu'il raconte sont réelles ou le fruit de son imagination, et ce qu'il ne nous raconte pas est tout aussi intriguant que ce qu'il nous raconte.

Le mystère de l'abbaye et des bois qui l'entourent sont directement puisés dans les canons de l'horreur folklorique et ne vous réserveront guère de surprises si vous connaissez un peu le genre, mais cela n'enlève rien à l'efficacité du récit qui ne s'éternise pas. Néanmoins, c'est surtout l'état d'esprit de James et ses émotions qui forment le cœur palpitant du livre. L'absence de l'être aimé, la douleur de la séparation et le désir de le revoir au plus vite, tout cela est finement retranscrit avec une douceur poignante. James n'a pas autant de pages à sa disposition que les protagonistes des trilogies de Bennett, mais il a l'avantage de s'adresser directement à nous, ce qui rend d'autant plus facile l'empathie à son égard.

Comme souvent avec la collection « Une heure-lumière », on a ici affaire à un ouvrage vite lu, mais certainement pas vite oublié. Si vous aimez les histoires d'amour contrariées et l'horreur subtile avec des accents gothiques, vous y trouverez votre compte à coup sûr.