A trente-deux ans, Mo Ran est fatigué. Elevé dans un bordel, il a su tracer son chemin jusqu'à se nommer lui-même Taxian-jun, empereur du monde de la cultivation. Mais maintenant, Mo Ran se sent seul, il n'a plus personne qu'il aime autour de lui. Alors, quand l'armée rebelle arrive pour se débarrasser de l'empereur fantasque et tyrannique qu'il est devenu, il se laisse aller à une mort finalement bienvenue.
Quelle n'est pas sa surprise de se réveiller dans son passé, alors qu'il n'a que seize ans et est encore un jeune disciple de la secte du Pic Shisheng. Déterminé à profiter de cette deuxième chance, il décide de ne pas commettre les mêmes erreurs puisqu'il connait déjà les trahisons qui l'attendent. Il ne laissera pas mourir Shi Mei, son frère martial dont il a toujours été secrètement amoureux. Et il ne laissera pas Chu Wanning, son shizun (maître), l'homme qu'il déteste le plus au monde, échapper à la colère et la haine qui bouillent en lui dès qu'il l'évoque...
Le danmei, genre littéraire chinois racontant des histoires d'amour entre hommes, a le vent en poupe, surtout combiné au wuxia (récits de héros combattant le mal) et plus particulièrement au xianxia (mettant au cœur de l'intrigue la cultivation et la recherche d'immortalité). C'est ainsi qu'arrive désormais en France la série The Husky and His White Cat Shizun, également connue sous le diminutif 2HA par sa communauté de fans.
Quand on est comme moi tombé dans le danmei via les ouvrages de Mo Xiang Tong Xiu, difficile de ne pas comparer. Le duo jeune chien fou / grand chat élégant et distant que forment Mo Ran et Chu Wanning évoque inévitablement celui de Wei Wuxian et Lan Wangji ; la réincarnation rappelle Shen Qing Qiu ; et la scène de faux mariage réveille des souvenirs de Xie Lian dans la montagne avec Hua Cheng. L'univers présente beaucoup de points communs, et l'intrigue le même genre de péripéties. Je manque de recul pour dire s'il s'agit de codes inévitables liés au genre, mais il est certain que ceux qui apprécient y trouveront leur compte car les ressemblances ne s'arrêtent pas là : comme les séries précitées, 2HA est également un page-turner très prenant qui donne envie de rester encore et encore en compagnie de ses protagonistes.
Mo Ran est un voyou éhonté, inculte et mal éduqué suite à son enfance passée dans une maison close. Peu motivé par les études, il manque également de connaissances sur la cultivation (au point qu'on se demande comment il a fini par devenir empereur) et surtout de puissance spirituelle, aussi doit-il sagement reprendre sa place de disciple en attendant de redevenir puissant. Perturbé par ses souvenirs de sa vie passée, il a parfois un peu de mal à rester à sa place... Il compte sur cette deuxième vie pour avoir une deuxième chance auprès de son bien-aimé Shi Mei, un beau jeune homme de son âge qu'il idéalise sans que celui-ci semble se rendre compte de ses sentiments. Il est également certain de ses sentiments pour Chu Wanning : une haine pure. Et pourtant... Pourquoi cherche-t-il toujours à gagner l'estime de son maître ? Pourquoi est-il si jaloux quand quelqu'un s'approche de "son" shizun ? Le désir intense qu'il ressent à sa vue n'est-il vraiment que corporel ? On a souvent envie de lui botter les fesses pour qu'il comprenne, mais il est répété à plusieurs reprises que Mo Ran manque de l'expérience nécessaire pour bien identifier ses sentiments, aussi va-t-il falloir prendre son mal en patience.
De son côté, Chu Wanning est un cultivateur particulièrement puissant. Sous ses dehors froids et stricts se cache une profonde détresse : il a toujours été seul, sans pouvoir compter sur personne, et ne sait pas s'ouvrir aux autres. Réputé sévère et irascible, il n'a que trois disciples, mais s'il se montre exigeant avec eux, il n'en est pas moins très protecteur. Il ressent une attirance secrète pour Mo Ran, mais s'interdit de laisser paraître quoi que ce soit, car il sait bien que le jeune homme ne lui rend pas ses sentiments et n'a d'yeux que pour Shi Mei. On ne peut manquer d'être triste pour lui, qui a tant de qualités morales mais personne qui les reconnaisse, et que Mo Ran malmène impitoyablement.
La vie d'un apprenti cultivateur n'étant pas de tout repos, l'intrigue prend vite un rythme vif avec des péripéties qui s'enchaînent. Entre les dangers, les souvenirs et un peu d'introspection pour découvrir les personnages plus en profondeur, on arrive à la fin le temps de le dire. Comme nos héros sont dans une position critique face à un antagoniste mystérieux, on a forcément très envie de découvrir la suite au plus vite ! J'ai été conquise par cette série vraiment sympa, je la recommande à tous les amateurs.
Le roman est disponible uniquement en grand format papier, en version classique brochée ou en version collector reliée (avec couverture épaisse et tranche illustrée). Il est rehaussé d'une poignée d'illustrations très réussies.
La série est terminée en VO en 350 chapitres. La VF proposée par Komogi devrait s'étaler sur 12 volumes.