Elles sont trois. Trois femmes liées à travers les siècles.
Tout d’abord, il y a Marìa, qui prendra le nom de Sabine à sa transformation pour effacer son passé et prendre un nouveau départ. Prenant la vie de sa créatrice, elle va découvrir d’abord seule le goût du sang et de ses conséquences. Puis au bout de quelques années elle va croiser le chemin d’autres enfants de minuit et en apprendre plus sur sa condition.
Et puis il y a Charlotte, qui, environ deux-cents ans plus tard, croise la route de Sabine lors de sa première saison londonienne. Et qui va en tomber amoureuse, ignorant qu’elle n’est qu’une proie que Sabine rêve de boire et de tuer. Les deux femmes vont vivre un amour passionnel, jusqu’au moment où Sabine va commencer à changer et où Charlotte voudra s’émanciper de Sabine.
Et enfin il y a Alice, jeune étudiante à Harvard à notre époque, qui va payer de sa vie une nuit passée dans les bras de Lottie. Mais qui va refuser la fatalité et tout faire pour retrouver sa créatrice alors que celle-ci a disparu.
Trois femmes, trois destins, qui nous offrent une fresque littéraire de presque 800 pages où s’entremêlent l’amour, le désir, la frustration, l’amitié, l’histoire mais aussi les relations toxiques, le sang, la violence, le tout sur fond d’émancipation de la femme via le prisme d’une liberté chèrement acquise.
La première à s’émanciper c’est Marìa qui, une fois transformée, use de ses nouveaux pouvoirs pour se débarrasser de son mari violent et enfin conquérir sa liberté. Elle va traverser les siècles seule avant de s’attacher à Charlotte, qu’elle va aider à se libérer du carcan puritain de la morale victorienne. Ensemble les deux femmes vont vivre un peu partout en Europe, au gré de leurs envies.
Alice, quant à elle, semble libre. Mais au fond d’elle, elle est perdue. Son histoire familiale et son déracinement font d’elle une jeune femme assez fragile, mais qui a envie de s’en sortir, loin de son Ecosse natale. L’irruption dans sa vie de Lottie va tout changer.
J’ai beaucoup aimé la plume de l’autrice, que je découvre avec ce roman. La traduction est soignée et le récit emporte le lecteur dans un tourbillon dont il est difficile de s’extraire. Surtout à partir de la seconde partie du roman, quand Charlotte fait son apparition. En effet, elle semble stabiliser la vie de Sabine, alors que celle-ci plonge dans des tourments dû à son grand âge vampirique. Il se développe alors au fil des pages une relation assez toxique, que j’ai trouvé très bien décrite au fil des pages.
Pour une fois, le thème du vampirisme n’est traité qu’à travers un prisme féminin et des amours homosexuelles. Il y a bien quelques vampires masculins qui apparaissent au cours du récit, mais ils ne sont clairement pas des personnages principaux. Même si chacun apporte quelque chose aux héroïnes de ce récit (Mattéo, par exemple, apprend à Sabine à revendiquer les lieux où elle veut vivre), ils ne sont pas les plus importants. Ce sont les femmes qui le sont. Ce sont elles qui ont le pouvoir, car elles sont plus fortes que les hommes, qui n’ont plus d’emprise sur elle. Et ça, c’est chouette.
En bref, c’est un très bon roman, que j’ai trouvé très bien écrit, avec une alternance de point de vue très bien maîtrisée. Pas de temps mort au cours du récit, pas de divagation, mais une succession d’événements qui nous mènent à la scène finale étrangement satisfaisante et frustrante à la fois. Satisfaisante parce que justice est faite, mais frustrante car j’aurais aimé suivre encore un peu les protagonistes de cette histoire.
Pour toutes les personnes qui aiment les histoires avec des femmes fortes, ou qui aiment les histoires de vampires loin des dandys de Anne Rice, des monstres façon Dracula ou des bad boys de la bit-lit, je conseille ce bouquin qui va vous transporter à travers les siècles et dans les méandres des sentiments amoureux.
Un excellent roman donc et une excellente découverte avec une autrice dont j’ai envie de lire d’autres histoires désormais.