Les Chroniques de l'Imaginaire

Miyamoto Musashi - Ishinomori, Shotaro

De son père guerrier, Takezô Shinmen a hérité sa passion pour le sabre. Pourtant, la relation entre le père autoritaire et le fils rebelle est délicate, d'autant plus après la répudiation de la mère, remplacée par une marâtre acariâtre. Quand Takezô tue des hommes qui essayaient d'abuser de sa sœur Ogin, il est contraint de s'enfuir.

A partir de là, le jeune homme décide de dédier sa vie à suivre la Voie du Sabre, sous le nom de Miyamoto Musashi. Au cours de ses errances, le sabreur hors pair affronte des maîtres réputés et les vainc, construisant peu à peu sa propre renommée et fondant l'Ecole des deux sabres.

Sur la fin de sa vie, il se retire dans une grotte et écrit plusieurs textes sur le sabre et la stratégie, dont le fameux Traité des cinq roues.

Kana réédite en grand format le récit one-shot de Shotaro Ishinomori, initialement paru au Japon sous forme de feuilleton en 1971, relatant les aventures de l'illustre Miyamoto Musashi. 

Figure emblématique du Japon féodal, Miyamoto Musashi (1584-1645) était un maître du sabre inégalé. Après son premier duel à l'âge de treize ans, il participa à une soixantaine de duels en restant invaincu. Le maître bushi est cependant également réputé pour ses talents en calligraphie et peinture, et laisse derrière lui des écrits précieux. La Voie du Sabre que suivait Miyamoto Musashi était un art martial, mais également une philosophie de vie, une quête sans fin pour atteindre la perfection.

Le manga est divisé en cinq chapitres titrés comme les cinq éléments évoqués dans le Traité des cinq roues : le livre de la Terre relate son enfance dans son village natal ; le livre de l'Eau évoque le conflit avec les Yoshioka d'Edo, où il affronte d'abord les frères dirigeant le clan puis le clan tout entier, éliminé en une seule nuit ; le livre du Feu le voit vaincre successivement un maître de la lance, un maître du kusarigama et un maître du bâton ; le livre du Vent raconte son dernier duel, le plus célèbre, l'opposant à Kojiro Sasaki, l'autre plus grand escrimeur de son temps et fondateur de l'Ecole du rocher ; le livre du Vide voit le maître adopter le petit Iori et se retirer pour écrire afin de transmettre son art et sa philosophie.

Au fil des pages, on découvre un homme avec une volonté de fer, déterminé à suivre la Voie du Sabre quel qu'en soit le prix. S'il veut gagner tous ses combats, ce n'est pas pour se faire un nom, mais parce que la Voie ne tolère pas l'échec. Pour atteindre son but, il laisse même derrière lui sa tendre amie d'enfance Tsu, qui n'a eu de cesse de le suivre de loin dans ses pérégrinations. S'il est un combattant exceptionnel, il n'hésite pas à user de tactiques que l'on pourrait qualifier de déloyales, essayant toujours de déstabiliser son adversaire en arrivant en retard ou en l'insultant.

Malgré les cinq-cents pages de cette œuvre graphique, la matière brute disponible pour le scénario est trop dense pour que le mangaka puisse avoir tout retenu. A titre de comparaison, le roman à succès La pierre et le sabre / La parfaite lumière d'Eiji Ysohikawa (initialement paru en feuilleton à la fin des années 1930), l'une des inspirations du mangaka, compte près de mille-cinq-cents pages. Difficile donc d'avoir autant de profondeur et de ne pas laisser de côté certains aspects de la vie de Miyamoto Musashi, qu'il s'agisse de certaines péripéties de son existence ou de ses talents artistiques, par exemple. L'essence même du personnage est cependant préservée, avec son obsession pour la Voie du Sabre.

Après un demi siècle, le graphisme a évidemment pris un petit coup de vieux. Les têtes des personnages sont exagérément rondes et caricaturales, pas vraiment esthétiques. On ne peut cependant qu'admirer la précision des décors et détails : forêt, montagne, rivière, neige, tout est magnifique et on est transportés. Les combats sont également retranscrits avec une grande force. 

Cette nouvelle édition est donc l'occasion de découvrir (ou redécouvrir) une œuvre puissante, et un personnage historique qui est entré dans la légende bien au-delà de son Japon natal.