Le roi Arthur est parti guerroyer contre les Saxons avec ses chevaliers, au premier rang desquels le fidèle Gauvain. Alors qu'il vole de victoire en victoire, il reçoit des nouvelles amères : son neveu Mordred, à qui il avait confié le royaume, s'est allié avec ses ennemis pour usurper le trône. La reine Guenièvre a fui Camelot pour échapper à ses noirs desseins, tandis que Lancelot, en exil, attend un appel qui ne vient pas. Le retour d'Arthur au pays ne se fera pas au son des trompettes et des rires, mais des épées et du sang.
Si J.R.R. Tolkien est surtout connu comme romancier, ce n'est pas forcément la forme littéraire dans laquelle il était le plus à l'aise, ni le plus productif. Comme en témoignent les nombreux poèmes figurant dans le Hobbit et le Seigneur des anneaux, c'était aussi un poète chevronné qui était particulièrement à l'aise avec la versification allitérative, une forme poétique anglaise qui remonte au Moyen Âge dans laquelle sont rédigés des chefs-d'œuvres tels que Beowulf ou Sire Gauvain et le chevalier vert, deux textes sur lesquels Tolkien a travaillé toute sa vie. Ce dernier témoigne de l'intérêt de Tolkien pour la légende arthurienne, dont l'influence sur son œuvre est moins connue que celle des mythes nordiques, mais n'en existe pas moins.
Le poème en lui-même n'occupe qu'un tiers de ce petit livre, quand bien même il y figure à la fois en anglais et en français. Il est inachevé, ce qui ne surprendra pas les connaisseurs de Tolkien, cet éternel procrastinateur. La langue est belle, mais particulièrement tortueuse, et il faudra se concentrer pour bien saisir le propos. La traduction de Christine Laferrière est honorable, même si traduire des vers relève toujours de la gageüre.
La majeure partie du livre est consacrée aux commentaires de Christopher Tolkien sur le poème de son père. Il sont organisés en trois grandes sections. La première brosse à grands traits l'évolution des mythes arthuriens au Moyen Âge, dans laquelle Tolkien a pioché à sa guise les versions qui l'intéressaient le plus pour proposer sa propre vision des personnages et événements. La seconde tisse des liens entre ce poème et la mythologie du Silmarillion, dont le plus évident est l'attrait d'un Ouest de légende au-delà des mers ; ce n'est sans doute pas un hasard si l'île elfique de Tol Eressëa abrite un port nommé Avallónë. Enfin, la troisième partie est une analyse des brouillons du poème, tout aussi pointue et détaillée que celles que l'on retrouve dans les différents tomes de l'Histoire de la Terre du Milieu et tout aussi dispensable pour la plupart du lectorat.
Malgré sa beauté certaine, La Chute d'Arthur reste un poème difficile d'accès et inachevé. Avec son commentaire dense et érudit, il ne s'adresse pas vraiment au grand public, même si le nom de Tolkien sur sa couverture fera certainement vendre.
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